Collection

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Du 11 au 14 juin 2015, dans l’exposition Des histoires d’art et d’interactivité au Musée des arts et métiers. Dans sa version originale, Mémoire de crayons, 1995-2001, une collection de 1024 crayons, une base de données pour ne pas les classer mais pour retrouver leurs histoires qui sont des fragments de celles de l’auteur. Photo ©jlb

Mémoire de crayons, 1995-2001

Installation interactive avec collection de 1024 crayons
Deux tables de 80 x 240 cm
Fichier numérique FileMaker, interface graphique sur iMac
Conception et réalisation : Jean-Louis Boissier
En confrontant une table vitrine contenant 1024 crayons — soit 32 cases de 32 crayons — et une table portant un ordinateur où se consulte une base de données, il s’agit de susciter une réflexion sur la mémoire attachée aux objets et sur la capacité du langage à rendre compte d’une collection d’objets authentiques et singuliers. Cette installation, produite en 1995 à partir d’une collection entreprise dix ans auparavant, provient des fiches sur ordinateur auxquelles chaque crayon a donné lieu. Sa fiche comporte à la fois sa description et un court récit de son origine et des circonstances de son entrée dans la collection.
Le visiteur, situé entre les deux tables, qui s’attache à l’un quelconque des crayons, peut en décrire les caractéristiques objectives en tapant des mots dans les rubriques de la base de données. Si cette description est juste, la fiche correspondante est trouvée. Elle confirme la désignation et affiche alors l’histoire du crayon. Chaque crayon présente à la fois des signes manifestes de son identité et recèle une histoire dont on ne devine rien. À chaque crayon est pourtant attachée une mémoire dont l’auteur est provisoirement le garant. Chaque crayon apparaît comme présence évidente et à la fois mystérieuse, transparente et à la fois opaque. Plus généralement, Mémoire de crayons montre qu’une base de données concrète, descriptive, permet d’échapper aux classifications normatives et permet, autrement dit, les rangements aléatoires et désordres quelconques.
L’histoire du crayon à mine de synthèse est étroitement liée à celle de la Révolution française. C’est pour faire face au blocus qui prive le pays de la mine de graphite provenant d’Angleterre que la Convention demande au peintre et inventeur Nicolas-Jacques Conté de mettre au point un instrument d’écriture propre à être distribué massivement, ce qu’il conduira rapidement. Au demeurant, Conté est porteur d’une mission consistant à inventer dans tous les domaines techniques et il est impliqué en première ligne dans la fondation du Conservatoire des arts et métiers. Le crayon Conté deviendra rapidement, à travers le monde, une puissante industrie porteuse de valeurs culturelles démocratiques.
Présentations : version 1, Credac/Ivry, 1995 ; version 2, Centre Pompidou, 2001

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[Photos JLB]
Samedi 6 décembre 2014, 17h, centre d’art (et de recherche) Bétonsalon, esplanade Pierre Vidal-Naquet, Paris 13e. Pour The Pale Fox, Camille Henrot a d’abord fait construire une salle-boîte, peinte en bleu vidéo, avec une moquette de la même couleur. Elle a dessiné des étagères en aluminium. Il y a une musique d’ambiance par Joakim Bouaziz, avec parfois des quintes de toux. Après, ça se complique. Il y a, par elle, des dessins et des calligraphies à l’encre de Chine, des sculptures en bronze ou en terre cuite, qui se réfèrent à ce qu’on a nommé Arts premiers, etc. Il y a des objets empruntés au Muséum d’histoire naturelle. Il y a un bric-à-brac d’objets collectés sur eBay, d’images trouvées, des collections de revues scientifiques ou de vulgarisation géographique, des paquets de journaux, etc. Il est question de l’évolution de la connaissance à l’époque du tsunami de données. Plus clairement, de la collecte, de la collection, de l’accumulation, de la classification, de la naturalisation. On avait aimé son film Grosse fatigue à la Biennale de Venise de 2013, et, en 2012, à galerie Rosascape, son herbier, comme au Palais de Tokyo, ses fleurs vivantes, etc. C’est une artiste intéressante, elle fait travailler pas mal de jeunes personnes, y compris ici pour dire les mots que son exposition nécessite. La brochure de 24 pages A4 distribuée aux visiteurs fournit elle aussi des lumières et reproduit la page 54 de La Pensée sauvage de Claude Lévi-Strauss, Plon, 1962, chapitre II, « La logique des classifications totémiques » :

De tels propos sous la plume d’un homme de science, suffiraient à montrer s’il en était besoin que le savoir théorique n’est pas incompatible avec le sentiment, que la connaissance peut être à la fois objective et subjective, enfin que les rapports concrets entre l’homme et les êtres vivants colorent parfois de leurs nuances affectives (elles-mêmes émanation de cette identification primitive, où Rousseau a vu profondément la condition solidaire de toutes pensée et de toute société) l’univers entier de la connaissance scientifique, surtout dans des civilisations dont la science est intégralement « naturelle ». Mais si la taxinomie et l’amitié tendre peuvent faire bon ménage dans la conscience du zoologiste, il n’y a pas lieu d’invoquer des principes séparés, pour expliquer la rencontre de ces deux attitudes dans la pensée des peuples dits primitifs.

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harun farocki parallele
Harun Farocki, Parallele I-IV, 2012-2014. Observée à Art Basel le 21 juin 2014, la pièce consiste en quatre projections, elles-mêmes en diptyques, portant sur « la question de comment les images produites technologiquement influencent et définissent nos sphères sociales et politiques, notre conscience et nos habitudes. » Elle décrit le développement, depuis trente ans, de l’image calculée par ordinateur, en mettant l’accent sur les formes d’animation. Harun Farocki suggère que bientôt, la réalité ne sera plus le critère d’une imperfection de l’image mais qu’au contraire l’image virtuelle sera le critère d’une réalité imparfaite.
Voyant ces montages impressionnants et intelligents, qui empruntent beaucoup aux images scientifiques et aux jeux numériques, je suis porté à revenir sur l’installation sur vidéodisque interactif Anthologie d’images de synthèses scientifiques (voir : http://jlggb.net/jlb/?page_id=220) que l’exposition Passages de l’image au Centre Pompidou m’avait « comnandée » en 1990 à partir des enquêtes et des collections que j’avais réalisées pour Image calculée, exposition de la Cité des sciences en 1988 — prolongée pour une dizaine d’années à partir de 1990. Mon idée était de donner à voir ce type d’images radicalement nouvelles dans le contexte de l’art contemporain. C’est ce que nous avons prolongé au Centre Pompidou avec la Revue virtuelle, 1991-1997.

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On peut observer, parmi les banderoles et bannières confectionnées pour les défilés du mois de mars, un emploi de la typographie de grand format qui passe par la composition sur ordinateur et la vidéoprojection. Voir, sur le site de arpla : http://www.arpla.fr/banners


(Photo JLB)

Au Palais de Tokyo, du 26 septembre 2008 au 4 janvier 2009, la carte blanche à Jeremy Deller a abouti à l’exposition intitulée « D’une révolution à l’autre », avec entre autres œuvres et documents, les banderoles de Ed Hall. Aujourd’hui à la retraite, il a confectionné depuis 20 ans plus de 400 bannières, peintes et en tissus de couleurs découpés et cousus, pour les syndicats, pour des groupes activistes et communautaires, comme contributions à des causes avec lesquelles il sympathise. (D’après le livre de Jeremy Deller et Alan Kane, Folk Archive: Contemporary Popular Art from the UK, Book Works, Londres, 2008, p. 82.)


Folk Archive: Contemporary Popular Art from the UK
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ISBN 1 870699-81-5

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Hiroshima-Nagasaki Four Years. Also Atomic Bomb Casualty Commission, October 10, 1949. Photographer: Carl Mydans. Life sous Google
On peut préciser : il y a, dans la collection accessible de Life, 8 clichés du même enfant sur fond de draps blancs. Ils révèlent une mise en scène, au demeurant intéressante, dans la logique de la mission politique et médicale aussi bien que de la mission photographique. Voir : Atomic Bomb Casualty Commission source:life


Gene Tierney. Actress Gene Tierney in sexy gown as she sits on set of her new movie Shanghai Gesture… October 1941. Photographer: Peter Stackpole. Life sous Google
On peut préciser : film de Josef von Sternberg.

Dans Le Monde du 5 décembre 2008, deux articles où il est question d’images : ils semblent contradictoires, mais peut-être pas tant que ça.

Dans sa « carte blanche » en dernière page, Caroline Fourest s’inquiète de « La démocratie des cerveaux disponibles » soit, concrètement, de la place et du rôle des journaux et des journalistes. L’« image » est d’emblée mise du côté des dangers : « Quand l’image, la pipolisation, l’anecdotique et la petite phrase dominent, il reste peu de temps pour aborder le fond. » Elle précise ensuite : « Le triomphe de l’image sur l’écrit favorise le fait-divers, le personnel et l’émotion au détriment de l’analyse, du recul et de la confrontation d’idées. » On comprend ensuite — parce qu’elles se font au stylo ? — que les seules images qui peuvent jouer un rôle éclairant sont les dessins d’humour : « Mais avec un peu de talent, le goût pour l’image peut être mis au service de l’esprit critique grâce à la satire et à l’impertinence. » À condition… — allusion faite à la récente « affaire Siné » à Charlie Hebdo —   « à condition de vouloir effectivement fortifier cet esprit critique et non conforter certaines pulsions infantiles, bêtes et méchantes. D’où la division au sein de la presse satirique, entre, d’un côté, celle qui veut vivifier la démocratie et, de l’autre, celle qui s’en moque, voire celle qui la vomit. »

Que les images, les photographies — ce sont elles qui dominent la presse et l’édition depuis des décennies et le numérique en renforce encore la présence et les effets — puissent être autre chose que l’anecdotique, le facile, le racoleur et l’expéditif, semble échapper à Caroline Fourest, à qui l’on reconnaît pourtant des qualités d’analyse et de clairvoyance militante. Que des photographies apportent des nuances, de la complexité, du contexte, du réel non immédiatement explicable, de l’intuition, semble inconcevable pour qui n’y voit que le subjectif et le factice. Que la photographie soit une construction, au détriment apparent de son objectivité, fait partie de ses facultés à encourager l’interrogation, pour qui veut les faire fonctionner dans une opération sensible et critique. Ainsi, bien des images « pipoles » en disent long sur ce qu’elles impliquent, tant elles donnent à toucher, par leur existence même, aux opérations qui les ont fait naître et diffuser.

Alors, si on retourne à la une, comment prendre l’annonce de la mise en libre consultation sur Internet de dix millions de photos de Life (par Google) ? Il faut rappeler que le magazine illustré américain, « qui fut le plus influent au monde dans les années 1930 à 1960 » avait cessé de paraître comme hebdomadaire en 1972 puis avait fermé définitivement en 2007. L’article du Monde souligne l’absence de légendes, de références d’auteurs, de classements, de sélection, l’impréparation apparente d’une opération de marketing contestée par les agences et les photographes : « Des images célèbres comme le portrait d’une migrante durant la dépression de 1936 aux États-Unis, par Dorothea Lange, ou le Débarquement en Normandie par Robert Capa, voisinent avec des variantes de photos connues et d’innombrables photos qui ont plus ou moins d’intérêt. Les noms célèbres succèdent aux anonymes, sans classement. »

La main mise totalisante de Google, de Getty et d’autres puissances commerciales de l’information peut appeler méfiance et dénonciation. La négation du potentiel informationnel, éducatif, politique, historique — et finalement artistique — des images obtenues par enregistrement et transmission (la photographie autrefois, Internet aujourd’hui), telle qu’elle semble se déduire du premier article, relève de l’aveuglement.

J.-L.B.


Liberation of Gertrude Stein. Author Gertrude Stein (R) walking with Alice B. Toklas (L) and their dog. France, 1944. Photographer: Carl Mydans. Life sous Google
On peut préciser : septembre 1944 à Culoz (Ain).

Liens :

Télécharger l’article sur Life

Télécharger l’article de Caroline Fourest

http://images.google.com/hosted/life

http://carolinefourest.wordpress.com/


Portrait photographique de Caroline Fourest.
[Photo prélevée sur Internet. DR]

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Boris Yankovsky, formes de sons de voix humaines et de différents instruments de musique. Recherches acoustiques sur les spectres et formants. Tracé original du système d’enregistrement de son Kinap de Shorin, 1935.

À voir au Palais de Tokyo (jusqu’au 18 janvier 2009)

Dans la très intéressante exposition « D’une révolution à l’autre. Carte blanche à Jeremy Deller », on peut s’intéresser de près à la section « 1918 – 1939 Son Z /» qui documente un aspect trop mal connu des recherches des domaines croisés des arts et des technologies dans la Russie (l’URSS) des années 1920. On y reconnaitra des préoccupations typiques du Constructivisme : l’alliance, voire la fusion des divers arts entre eux; l’harmonisation des relations entre sciences, arts, économie, politique et société.

Dans le domaine musical, c’est tout un ensemble de découvertes primordiales qui portent sur les ondes électromagnétiques, les sons synthétiques et électroniques. Le cinéma, art de technologies nouvelles à l’époque, est notamment le lieu de diverses tentatives de création optiques de sons.

Ces artistes et scientifiques, qui anticipent de nombreuses innovations des domaines de la communication, de la cybernétique, de la psychologie, la sémiotique, etc. autant que du domaine de l’art et des sciences et technologies attachées à l’art, seront réprimés par le pouvoir, rentreront dans le rang, tenteront d’effacer leur participation aux recherches et expérimentations de l’« avant-garde ».

Lire : André Smirnov & Lubov Pchelkina, « Expérimentations sonores et musique électronique dans la Russie du début du XXe siècle. », Palais/, n° 7, automne 2008, pp. 67-77.

Le variophone d’Evgeny Sholpo, 1934, utilisant des disques découpés.
[Photographies faites dans l’exposition par J.-L.B.]

Ci dessous, un extrait du Dossier pédagogique à télécharger ici dans sa version complète en pdf.

Effervescence

Réalisée par Jeremy Deller en collaboration avec Matt Price, écrivain et éditeur de Birmingham, maintenant installé à Londres pour le compte de la Albion Gallery, et Andrei Smirnov, fondateur et directeur du Centre Theremin à Moscou, cette partie interroge les différentes collaborations qui ont existé dans la Russie des années 20 entre avant-garde, innovation technologique et recherche scientifique, ainsi que leurs conséquences sur les nouvelles modalités de production artistique et industrielle. Cette section comprise en 1918 et 1939 commence avec la fin de la Première Guerre mondiale et se termine au moment où commence la Seconde Guerre mondiale. Lire la suite »

Une nouvelle page sur techniques graphiques et politique.

Pour compléter notre article Tags et images (http://www.taggraph.com, voir plus bas, Mardi 6 novembre 2007), on consultera utilement les sites suivants :

http://labs.systemone.at/retrievr
http://labs.ideeinc.com/multicolour
http://www.oskope.com
http://www.airtightinteractive.com
http://www.krazydad.com/colrpickr

Lire également, sur e-AdNM, l’article de Julien Levesque : « Gokhan Okur : de la base de données photographiques au film »