LE COURS

Ce cours a été l’occasion d’explorer certaines problématiques liées à la
présentation et à la représentation du temps dans l’ensemble des arts visuels. Nous avons également traité du temps dédié à la production
des œuvres, du temps à l’œuvre dans les créations artistiques et de la
manipulation du temps dans le cinéma et la vidéo.
Nous présentons ici les travaux réalises par les étudiants ainsi que des textes ou ils expliquent la spécificité de leur démarche.

Le temps utilisé comme matériau.

 

Dans un cadre professionnel, j’ai utilisé photoshop afin de montrer, après travaux, le rendu final pour le permis de construire de cette maison.

Il a fallu faire différents essais de façades (pierres apparentes, enduit), de menuiseries (couleurs et formes différentes), ainsi que des modifications (ajouter ou enlever des fenêtres).

J’ai donc passé beaucoup de temps à retravailler cette photographie, puisque j’ai commencé ce travail mi-octobre et j’ai terminé le montage final fin novembre, après choix définitifs du client et de l’architecte.

Ce travail s’est donc effectué tout au long du semestre, parallèlement à ma réflexion à fournir pour le cours : il fallait produire un travail qui rende compte du temps comme matériau.

C’est début novembre que j’ai fait le lien entre cette série de photomontages et le sujet du cours. Grâce à photoshop, je faisais voyager cette maison dans le temps. Sur certains montages, elle avait l’aspect qu’elle avait perdu, et sur d’autres, l’aspect qu’elle aura dans le futur.

 

C’est à la manière d’un ouvrier du bâtiment, utilisant des matériaux physiques pour construire, que je travaillais moi aussi, utilisant l’informatique et le temps pour seuls matériaux.

Je me suis naturellement tournée vers l’architecture pour faire ce projet, puisque les œuvres architecturales demandent un temps de production et de réalisation important, ainsi qu’un temps de parcours long pour voir l’intégralité de l’œuvre, d’après Umberto Eco. Je me suis intéressée au temps de réalisation de l’œuvre, car une vidéo sur le temps de parcours ne me convenait pas.

 

Pour travailler, je suis partie d’une unique photographie de la façade, que j’ai retouchée, et j’y ai parfois inséré des éléments.

01 Photographie de départ.

Vial Menuiserie Porte IESKERO Provence teinté geranium-pelargonium-en-jardiniere-60-cmPhotographies utilisées dans certains montages.

J’ai donc d’abord pensé à faire une vidéo en stop motion, avec les 25 montages que j’ai produites pour accélérer le temps et faire vieillir cette maison.

J’utilisais le temps qui passait comme matériau.

Cette idée a donc donné une première vidéo.

27 from Jeanne Kubik on Vimeo.

Après ce premier rendu, je me suis interrogée sur l’intitulé du cours, qui évoque le temps, ce flux immatériel, comme un matériau. Comme mon projet se plaçait dans un cadre architectural, j’ai pensé à faire une deuxième vidéo, qui exploiterait le temps en tant que matériau de construction cette fois-ci. La façade ne se dégrade plus au fil du temps mais se reconstruit grâce au temps.

C’est ce rendu final que je choisi, puisque l’ambivalence (avec le temps qui passe, mais aussi sa situation de matériau de construction) m’a plu.

26 from Jeanne Kubik on Vimeo.

Mes références :

Tout d’abord, le choix du format vidéo en stop motion a été influencé par le visionnage de Still Life et Sam Taylor. La sculpture de l’artiste est faite pour se décomposer, se modifier avec le temps qu’il accélère ensuite. Ici le temps est naturel et l’artiste l’utilise pour produire sa vidéo. Même si le temps que j’ai utilisé est artificiel, puisque je l’ai moi même créé avec une seule photographie modifiée différemment à chaque fois, le principe reste le même que dans son travail. Tout comme chez Sam Taylor, la prise de vue garde le même point de vue tout au long de la vidéo, la dimension ne change pas. On voit les mêmes éléments tout au long du visionnage, détériorés ou modifiés par le temps. Sam Taylor se sert du temps, l’oeuvre n’existe pas sans celui-ci, tout comme pour mon travail.

Ce système de temps qui évolue toujours sur la même composition est aussi visible dans les tableaux d’Archimboldo, ou le temps au sens de saison, se transforme d’une image a une autre.

 

Ensuite, je me suis intéressée au travail de Gordon Matta-Clark qui a beaucoup travaillé avec l’architecture, en détériorant, modifiant, découpant, cassant, des structures architecturales. C’est ce que j’ai essayé de faire dans mon projet, en y ajoutant le paramètre de temps en vidéo.

gordon-matta-clark

 

Enfin, bien sur, le temps de réalisation de la production artistique a été très important dans mon projet. J’ai passé des heures pour fournir les 25 photomontages dont j’avais besoin pour pouvoir faire une vidéo assez conséquente, qui témoigne d’une évolution temporelle.

 

 

 

Division

         Pour commencer, ce texte a pour but de présenter mon projet qui s’intitule Division, d’expliquer comment je l’ai réalisé et de le contextualiser historiquement. Il s’agit d’une série de quatre photographies accompagnées d’une vidéo en stop-motion.
          Chaque photographie ainsi que la vidéo représente un moment, une fraction de temps bien définie. L’ensemble de mon projet  est la soirée de l’individu (seul personnage visible dans mon projet) à partir du moment où il rentre chez lui le soir jusqu’au moment où celui-ci va se coucher. De plus les photographies et la vidéo se passent chacune dans une pièce différente d’un appartement, un environnement  est donc associé par moment ce qui lie le temps et l’espace. Le premier moment se passe dans l’entrée, le deuxième dans la cuisine, le troisième dans la salon, puis dans la salle de bain et pour finir dans la chambre. J’ai donc divisé la soirée de l’individu en cinq moments dans cinq pièces différentes. Chaque fraction de temps, donc chaque photo et la vidéo sont visibles dans un ordre chronologique, on devine l’enchainement des actions, du temps définie dans mon projet. Les liens logiques entre les divisions du temps sont visibles, ils se succèdent. Car dans les photographies et la vidéo, je montre la division du temps de chaque moment : les différentes actions qu’effectue le personnage à travers le temps lié à chaque lieu. Pour résumer, mon projet divise le temps définie de la soirée de l’individu plusieurs fois et crée donc plusieurs temps : il y a un temps par pièce représentée par une photo ou une video, et à l’intérieure de chaque photo ou vidéo le temps est une fois de plus divisé par les multiples actions qu’effectue le personnage.
         Avec ce projet, on ressent le passage du temps grâce à des procédés techniques de réalisation. Pour les photographies, j’ai utilisé la technique de l’open flash qui est peut connue et peut exploitée et qu’on pourrait rapprocher de la technique du light painting car celle-ci utilise des sources lumineuses tenues à la main et un appareil photo en pose longue dans un environnement sombre.
1989.55.5 001
Light paintng par Man Ray (1935).
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Light painting par Picasso (1949).
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Photographies en light painting par le collectif allemand Litchfaktor utilsant seulement le light painting.
Pour réaliser mes photographies, j’ai donc trouvé un point du vue par pièce qui me plaisait en plaçant mon appareil sur un pied pour que celui-ce ne bouge pas. Je l’ai réglé pour qu’il prenne des photos  en pose longue de trente secondes et je me suis munie d’un flash portatif assez puissant. J’utilise également un objectif fisheye qui a une distance focale très courte et un angle de champ très grand, on peut donc voir l’intégralité de la pièce par contre celui-ci provoque un effet de distorsion qui courbe les lignes droites excentrées, sur les côtés de l’image. Cet objectif donne à mes photos un côté viseur de porte caméra de surveillance que je trouve particulièrement intéressant et original. Puis j’actionne l’appareil photo dans un des pièces, il faut qu’il y ait une source lumineuse la plus discrète possible mais l’environnement reste très sombre pour qu’on ne me voit pas lorsque je me déplacerais dans le champ de l’appareil photo comme c’est une pose longue. Le personnage rentre en scène, il effectue plusieurs action  et se déplace dans la pièce et je déplace aussi en prenant des coups de flashs dès qu’il fait une action. On peut croire que ce procédé est simple mais il faut faire beaucoup de photos pour en obtenir une valable et souhaitée. Il faut déjà réfléchir aux différentes actions que le personnage va faire ainsi que son parcours dans l’espace de la pièce, puis tester à quels moments je lance mon flash et de où et dans quelles directions. Chaque coup de flash éclairera le personnage à un moment et à en endroit précis et créera une photo du personnage, en déclenchant plusieurs coups de flash cela fera plusieurs superpositions d’image. Il faut donc voir combien de coup de flash rend le mieux car si on flash trop, il y aura trop de différentes images sur la photo, trop de superpositions ce qui rendre les différentes actions brouillées, on ne pourra pas bien les distinguer. Cette technique photographique est très intéressante car elle est sans retouche faite sur photoshop (superpositions) et les possibilités de rendu sont infinies, elle est vraiment à découvrir et à explorer. Voici quelques test que j’ai réalisé avant les photographies finales :
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          Pour ce qui est de la vidéo, j’ai choisi la technique du stop motion ou d’animation image par image qui consiste à créer une vidéo grâce à une succession de photographies permettant de créer un mouvement à partir d’objets immobiles. Ce procédé est beaucoup utilisé au cinéma pour faire des films d’animations entièrement en stop motion  (Le Roman de Renart par Ladislas Starevitch en 1930, Wallace et Gromit en 1989, L’étrange noël de monsieur jack en 1993 et les premiers épisode la série South Park par exemple) ou créer des effets spéciaux (King Kong en 1933, Jason et les argonautes en 1963 ou les premiers Star Wars par exemple) et dans de nombreux courts-métrages ou clips vidéos. Je l’ai choisi car celui représente bien une fois de plus la division du temps d’un moment fractionné photo par photo, en assemblant ces photographies cela va créer un nouveau temps qui est modifiable et artificiel (on peut créer de nombreux effets grâce au stop motion). J’ai donc placé une fois de plus mon appareil sur un pied, fixe au milieu du salon et j’ai choisi de prendre des photos en tournant l’appareil sur lui même et en suivant le personnage. Les 123 photos misent les unes après les autres forment donc un cercle et représente bien pour moi le cycle du temps, rapport à l’horloge, aux aiguilles qui tournent, aux divisions du temps (jours, heures, minutes, secondes etc) qui passent et se répètent sans cesse. On peut regarder la vidéo en boucle, sans jamais s’arrêter. Pour finir, j’ai comme les photographies utilisé l’objectif fisheye pour introduire une continuité avec les quatre photos mais j’ai rajouté dans la vidéo une couleur, teinte par image pour créer une dynamique visuelle entrainante. Il y seize teintes de couleurs différentes qui se répètent en boucle comme les photographies. Cela représente aussi le cercle colorimétrique, rapport avec le cycle, la boucle. Je voulais aussi montrer que c’est dans cette pièce que le personnage prend le plus de plaisir, s’amuse, c’est le moment de détente de sa soirée. La vidéo initiale dure donc 15 secondes, je l’ai répétée trois fois pour en créer une de 45 secondes montrant la répétitivité du quotidien. J’ai choisi de mettre un musique électronique (Riviera Reflex de Poulbo), me faisant bien penser à l’idée de cercle, de quelque chose qui tourne en accéléré sans s’arrêter. Voici quelques exemples de stop motion que j’apprécie particulièrement et qui m’ont poussé à choisir cette technique pour ma vidéo :
Rainbow Dance de Len Lye réalisé en 1936, stop motion en dessin.
Muto par Blu réalisé en 2008, stop motion en graffitis.
Clip musical de Professor Kliq pour la chanson Wire and flashing lights réalisé en 2013, stop motion avec des volumes en fil de fer et en carton.
          Pour l’ensemble de mon projet sur le temps, je me suis beaucoup inspiré de différents artistes qui explorèrent la décomposition des mouvements que ce soit des peintres, photographes ou vidéastes comme :
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Eadweard Muybridge et la chronophotographie (fin 19ème)
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Jules Marey et également son travail sur la chronophotographie à la même période.
Tests-with-flash-lightEnfin Albert Londe avec chronophotographie à la même période.
marcel-duchamp-nu-descendant-un-escalier-1912Marcel Duchamp avec son tableau Le nu descendant un escalier (1912).
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Harold Eugene Edgerton et son travail photographique au milieu du 20ème.
Norman mc Laren et sa vidéo Pas de deux (1968).
          Voici donc ma série de photographies et ma vidéo :
PHOTO TESTAS 1
cuisine bonne
PHOTO TESTAS 3
PHOTO TESTAS 4

Projet d’arrêt cardiaque

Dans cette œuvre je m’intéresse a la définition individuelle qu’on a du temps, sans mettre de coté complètement le fait que le temps soit continu,  les deux historiens d’art Deleuze et Merleau Ponty conçoivent eux le temps comme quelque chose d’extérieur et disent qu’il est  « le médium d’une extériorité qui articule une intériorité » de mon côté je perçois la temporalité comme un ensemble de perceptions individuelles, des couches de temps s’imbriquant les unes sur les autres ou encore de strates temporelles pour reprendre Michel François. On considérera ici le temps comme une entité crée par l’homme,  car elle est en lui, en effet nous avions la notion du temps qui passe bien avant l’apparition de l’horloge, la société l’a ensuite intégrée dans nos mœurs et dans notre quotidien selon un besoin de quantifier et de « régler » les choses. Le temps a maintenant pris une grande importance dans nos vies et est devenu un facteur de stress qui régule notre vie, en effet nous avons de plus en plus peur d’arriver à nos fins, et nous essayons de plus en plus de vivre dans l’instant présent, ce qui nous donne une vision plus arrêtée du temps Pamela M.lee parle de chrono phobie. Nous en arrivons au sujet traité dans ma pratique, c’est-à-dire la mort c’est donc comme vous le comprenez  la finalité de cette temporalité sur laquelle je me suis penché, une œuvre présentée lors d’une conférence a l’inha en est un bon exemple, c’est une horloge basique dans sa forme qui compte les heures en fonction de la destruction de la terre et prend donc le temps comme l’attente d’un événement particulier et non pas un écoulement infini de matière, il s’agit pour moi du même phénomène face a la mort. Roman Signer voit en effet cette finalité comme événement par excellence, notons que Cronos dieux du temps dans la mythologie est souvent accompagné d’une faucille.

Cet arrêt total du système nerveux qui commande une grande partie de notre vivant désactive tous nos cens sans exception, nous en avons une peur grandiose et inavouée, c’est la plus grande que l’on ait. C’est cette sensation que je voudrais traiter dans cette vidéo, une sensation de stress continu qui s’étend jusqu’à la déconnexion du cerveau même si d’un coté ce « stress » de vie n’est pas un facteur précis, la matière qu’est le temps dépend du rapport qu’on a face a la mort, comme l’affirme Christine Macel dans le Temps pris, le temps de l’œuvre, le temps à l’oeuvre la perception du temps est propre a chacun on conçoit très bien cette pensée dans l’installation interactive d’Olga Kisseleva et de Sylvain Rénal : « le temps à l’œuvre », une horloge numérique est disposée devant un panneau de verre, le spectateur est invité a placer ces mains sur un capteur sensitifs qui augmentera la vitesse du temps si cette personne est stressé et inversement, cette œuvre témoigne de la perception moderne du temps.

Dans ma vidéo nous suivons la journée d’une personne non déterminé qui suit son cours jusqu’à que ce dernier subisse un arrêt cardiaque, j’ai beaucoup travaillé l’aspect sonore de la vidéo qui ici est aussi important que le visuel, pendant la mort physique ouïe, odorat, toucher, le gout et la vue s’estompent jusqu’au néant total, j’aurais aimé pouvoir tous les représenter mais le médium vidéo m’y empêche. J’ai donc incrusté le battement du cœur dans la bande son que j’ai extraite de la vidéo  ce qui crée un stress continu, on verra qu’à la fin on se sent comme soulagé, comme si une pression était supprimée. Nous suivons la vie du personnage principal de ces propres yeux, le point de vue interne de la vidéo permet de se mettre à la place du personnage afin de mieux le comprendre, voir s’y identifier.

Quelques modifications ont étés mises en place dans la bande sonore au niveau du rythme cardiaque ainsi que sur le support vidéo sur lequel des effets de flous et de déformations ont étés incrustés. J’ai fait en sorte que ces déformations se complètent et que le spectateur fasse un lien entre elles, ainsi nous pouvons aisément comprendre l’importance de cette temporalité intérieure régulée par le cœur.

Pour conclure même si je me penche vers la conception personnelle qu’on a du temps, cette dernière est assez minime et ne rend pas suffisamment compte de la perception générale, après la mort d’une personne lambda il est clair que le temps s’arrête en elle, mais ce n’est pas pour autant qu’il se fige totalement, et ne bouscule en aucun cas la temporalité collective.  En effet si on considère l’homme comme un tout et que l’on parle d’humanité alors cette définition qu’on a de cette matière se voit renouvelé car le temps est alors définit par une multitude de vies.

tempscommemateriaux from popeye on Vimeo.

Maison familiale

triptyque

Les photographies de ce triptyque ont été réalisé durant un week-end où je rendais visite à ma grand-mère qui était en convalescence. Quelques mois avant sa mort. 

INTRODUCTION

Lorsque j’ai perdu ma grand-mère maternelle, la maison familiale où nous nous retrouvions tous pour les grandes occasions s’est retrouvée vide. Ma mère et ses frères ont décidé de la vendre et avant cela de la vider entièrement. Le week-end du 19 octobre 2013 fut décrété et j’ai alors décidé de prendre des photos et de faire des captations vidéo de cet événement qui n’est pas commun et qui n’arrive qu’une seule fois dans l’histoire d’une famille.

Une fois sur place tout le monde était réuni, ma mère, ses frères, leurs femmes et leurs enfants. Une grande benne avait été loué pour l’occasion afin d’y déverser toutes les affaires que la demeure abritait. Soixante années de vie de trois générations s’étaient accumulées en objets et meubles de toutes sortes. Il est remarquable de voir le détachement que mes oncles ont pu mettre à cette tâche, tout était jeté sans distinction.

Dans ma série de photographie j’ai retranscrit les multiples sentiments que j’ai éprouvé durant cette journée. Voir les traces des meubles apparaître sur les murs, prendre conscience de toutes les vies qui ont traversé ce salon, faire l’état des lieux. Redécouvrir des objets liés à un événement marquant, comme la robe de mariée de ma mère. On ne maîtrise pas le temps, ni même notre mémoire, le seul moyen de se souvenir sont les photographies. En scannant les photographies que mon grand-père avait réalisé, et que j’ai pu récupérer durant cette journée, j’ai pu me ressouvenir ou bien m’imaginer ce qui s’était passé dans cette maison. Cette série de photographies mélange deux temps : celui du présent, avec les restes du pique-nique du midi, et celui du passé de ma famille. Grâce à l’absence de ces meubles on redécouvre les événements, une tapisserie cachée derrière un buffet. Certes, dans ce travail, il y a un récit autobiographique car c’est de ma famille dont je parle mais il y a aussi une notion que nous avons tous, celle de la mémoire familiale.

 

 

Le banc

Le banc, Maison Familiale, Clara Ferrand 2013

Les roncesLes ronces, Maison Familiale 2013

LA TRACE PHOTOGRAPHIQUE

La photographie est un médium qui a pour particularité d’être indiciel, c’est à dire qu’une photographie est la trace de l’objet ou de la personne qu’elle a pour sujet. Bien souvent ces images sont les témoignages d’évènements passés, comme la célèbre photo de Trang Bang qui nous montre des enfants apeurés durant la guerre du Vietnam. Ma série de photographies est non seulement la trace de la journée dédié à vider la maison familiale mais également celle de quarante ans de la vie de ma famille.

8 juin 1972 trang bang, sud vietnam,kim phuc

Kim phuc, de Trang Bang, Sud Vietnam 8 juin 1972

Les marques des meubles visibles sur certaines images se sont faite avec le temps, elles témoignent tout comme la photographie d’une présence.  C’est ce que Roland Barthes appel le «ça a été» dans La Chambre claire, pour lui «La photo est littéralement une émanation du référent. D’un corps réel, qui était là,(…)» il dit encore qu’il y a «double position conjointe : de réalité et de passé.» . Ces traces sont comme des photogrammes sur un mur.

 

Le buffet

Le secrétaire, Maison Familiale, Clara Ferrand 2013

Aussi parmi ces photographies d’absences j’ai réalisé des images d’objets qui m’ont interpellé comme une photographie de mon grand père ou bien la robe de mariée de ma mère retrouvé dans un carton au grenier. Ce sont des objets qui me rappel une histoire, celle d’une histoire qui m’a précédé, des évènements que je n’ai pas vécu, mais qui ont touché ceux que j’aime.

Mon Grand-pèreMon Grand-Père, Maison Familiale, Clara Ferrand, 2013

robe de mariée

La robe de mariée de ma mère, Maison Familiale 2013

Suite des photographies :

L’ALBUM DE FAMILLE

«Grâce aux photographie, chaque familles brosse son propre portrait et tient sa propre chronique : portefeuille d’images qui témoignent de sa cohésion.» Susan Sontag, Sur la photographie.

Lors de cette journée j’ai récupéré des caisses remplies de photos qu’avait réalisé mon grand père (qui était photo-reportaire de profession), et j’ai entrepris les numériser afin de pouvoir les répertorier, les classer et les utiliser dans mon travail photographique. Sur ces photographies j’ai vu des personnes que je connaissait pas, même si c’était ma mère et mes oncles. Ces photos qui ont été prise durant leur enfance et sur lesquelles ils portraient des habits qui ne m’étaitent pas familier et avaient sur leurs visages une certaine inocence qui depuis bien longtemps n’existait plus.

Lorsque nous perdons un proche nous nous ratachons directement à une photographie de ce proche où nous le reconnaissons tel qu’il était pour nous. Chaque personne garde avec lui les photographies d’être ou même  d’endroit qui lui son chère, cela prouve qu’ils ont existé. L’importance des portraits est montré également dans la manière qu’avaient les nazis à detruir toute les affaires personnelles dont les photographies des déportés juifs, afin qu’il n’y ait plus de traces de leurs vies, de leurs identités.  Cette notion d’identité a aussi une grande part dans l’intérêt que nous portons aux albums de famille, sur certaine photographie nous n’arriverons pas à reconnaitre des personnes qui y figurent, «quelqu’un à dit qu’on meurt deux fois. On meurt quand on meurt et on meurt une deuxième fois quand on trouve notre photo et que plus personne sait de qui il s’agit», la photographie meurt alors elle aussi. Cela signifit que beaucoup de temps ont passé et que la présence de cette personne n’est plus inscrite dans une mémoire vive.

Parmis les photos que j’ai récupéré il y en avait une qui montrait toute la famille réunit dans le salon avec aux murs l’ancienne tapisserie dont j’ignorais l’existance jusqu’à sa découvert lors de mon repportage. Cependant cet album de famille ne sera que pour vous des images parmis tan d’autres, vous qui êtes étranger à l’histoire de ma famille et qui ne connaissez pas les personnes qui figurent sur ces images. Tout comme Roland Barthes se refusait à montrer aux lecteurs de La Chambre claire la photographie de sa mère dans le Jardin d’hivers, je ne vous infligerait pas les inombrables photos représentant mes proches à l’excepté de celle où apparait la fameuse tapisserie qui est pour moi comme un dialgue entre deux temps.

 « Face aux documents photographiques des parents morts, aux images qui témoignent de leur existence passée, le descendant rêve, s’interroge, enquête. Que disent ces images lointaines ? Peuvent-elles réléler quelques secret oublié ou insu ? Témoignages, les documents font signe à ceux qui les regardent, alors éloignés de l’instant de l’image, de la lettre ou de la prise de vue par une vaste étendue de temps » Claire de Ribeaupierre, Le roman généalogique – claude simon et Georges Perec

le salon

Le salon, Maison Familiale 2013 et Archive familiale 1978

MOUVEMENTS TEMPORELS

La dernière partie de mon travail est un court métrage que j’ai réalisé durant la journée du 19 octobre 2013. Le procédé cinématographique est pour moi très compliqué car il se passe en trois temps, celui de la captation vidéo, le choix des rushs puis le montages des séquences. J’ai utilisé mon Canon 5D Mark II pour les captations vidéos comme pour les photographies. J’ai filmé sur le vif, l’instant présent, sans faire mise en scène. Toute les actions dans ce court métrage sont authentiques, c’est à dire réaliste tout comme la photographie.  je me suis inspirée de la manière dont son filmé les documentaire.

Pour moi le cinéma est un dérivé de la photographie simplement le spectateur est contraint par le temps car ce n’est pas lui qui choisit les images qui seront montré plus longtemps, par image je veut dire cadrage car comme nous le savons le cinéma est composé de 25 images par seconde.

J’ai construit mon court métrage en trois temps :

– La découverte de la maison, des différentes pièces, où jessai alors de rendre compte de l’espace.

– Puis l’action qu’entreprenne mes proches de vider la maison, le spectateur assiste alors à des conversations sur ce qui est bon de garder ou bien jeter.

– Et enfin la discussion durant le pique-nique du midi afin de définir ce qu’il va advenir de la maison, sera t-elle vendu le jour même? si oui à quel prix ?

La scène qui pour moi est la plus importante est celle du pique- nique qui se déroule vers la septième minute du court métrage. J’abordent le temps à venir, la vente de la maison familiale, le faite qu’elle va appartenir à une autre famille et qu’elle sera témoin de nouveaux évènements, d’une nouvelle histoire. Alors que jusque là nous avions à faire au passé ou bien au présent, ici nous entrons dans des plans d’avenir. Cette maison est alors comme l’image  du phénix qui renait de ses cendres.

LE COURT-METRAGE :

 

BIBLIOGRAPHIE

La Chambre Claire, note sur la photographie, Roland Barthes, Ed Gallimard, 1980

Sur la photographie, Susan Sontag, Ed titre 88, 2008

Mort de la photo de famille ? De l’argentique au numérique, Irène Jonas, ed l’Harmattan, 2010

Le roman généalogique – Claude Simon et Georges Perec, Bruxelles, Ed La part de l’oeil, 2002

RÉFÉRENCES PHOTOGRAPHIQUES ET CINEMATOGRAPHIQUE

Sally Mann, Family Pictures 

Jaret Belliveau, Biography

Agnès Varda, Les plages d’Agnès, Film sorti en 2008

 

AntiSaturn

La question de la temporalité m’interpelle de part son caractère global, quasi universelle et surtout de part sa vastitude.
Je ne voulais cependant, pas tourner autour du « temps/horloge » qui régit notre vie, la rythme et la cloisonne. Pas eu l’envie, car la finitude me pèse. L’être humain est mortel, il court après le temps, angoissé. Ce temps qui passe nous ramène sans cesse vers cette idée de mort.

Une fin existe, elle nous attend et on la rumine dans notre tête jusqu’à ce qu’elle nous tombe dessus. C’est donc nous qui l’attendons, ne serais ce pas dans ces instants justement, que l’on perd son temps? Apparement si précieux.

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Projet « Vandal », un graffiti végétal dans les rue de Paris, 2012.

 

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Extrait photographique d’une oeuvre de 2007, sans titre.
Technique mixte sur papier (encre, pastel, fleurs séchées).

Je travaille certaines de mes œuvres avec des matières naturelles, donc périssables (mousse, fleur, branche, écorce…), j’y vois un lien avec le temps qui passe dans cette image du dépérissement d’un végétal.
Mais ici, je voulais ressentir le temps autrement, doux et léger. Etre à l’écoute et observer les mouvements de la nature grâce à une installation sauvage de quelques heures in situ. D’ailleurs, l’impact du temps est plus visible à l’extérieur, d’où le cadre choisi: une forêt.

« Sentir la respiration de la forêt, déployer sa peau devenue végétale, explorer le souffle et l’air, respirer l’ombre ou le vent, c’est toujours épouser le devenir, être « fleuve ». Penone.

Le but était donc de capter du temps non figé dans une nature, qui se trouvera ensuite délocalisée et rendu infinie de part la possibilité de revivre cet instant. L’instant n’est pas mort, il survit grâce à la captation vidéo des mouvements présents.

« La notion de temps est un corollaire de la notion de mouvement: le mouvement se fait dans la durée et si le temps venait à s’arrêter plus rien ne bougerait. Pour Aristote le temps est le nombre du mouvement selon l’antérieur et le postérieur. A contrario le temps semble ne plus faire sens quand l’idée de mouvement disparaît, car le temps suppose la variation ».

On peut donc voir le mouvement comme une marque du temps. Avec ce projet je me suis engagée dans la récolte de certaines traces de ce temps, que ce soit avec le mouvement du vent, ce corps en marche, ou la lumière changeante.
Je voulais simplement capter une variation subtile du temps, avec le mouvement léger du vent dans ces tissus rendus vivants, à la fois mobiles et immobiles, dans un déplacement presque imperceptible, tout comme ce corps qui passe au loin.
J’ai cherché a confronter deux temporalités, celle du vent dans les tissus et le passage de ce corps. Pourtant, après le visionnage des images filmées, je me suis rendu compte que cette seule confrontation d’un mouvement corporel et de celui des tissus n’était pas assez pertinente.
Durant le montage, j’ai donc décidé d’ajouter une nouvelle temporalité grâce à l’enregistrement d’un son. Cette matière sonore prise dans une rue de Paris, quelques jours après avoir filmé l’installation,  amène plus clairement cette notion de double temporalité que je cherchais à montrer. Sachant que ce son n’appartient pas au même endroit, ni au même moment, il est autre et se retrouve entrelacé dans ce premier temps filmé.
J’ai tout d’abord fait mon découpage sur Première Pro, pour ensuite utilisé After effect pour le montage. Le film durait 17 minutes à la base et j’ai coupé de nombreuses séquences jusqu’à attenidre 2 minutes et 5 secondes. Il y a très peu d’effets visuels, je n’ai pas vraiment retouché les images à part pour la colomètrie et pour et pour l’insertion du titre encadré.
Le déroulé du film est simple, au début on se trouve à l’intérieur des tissus, sans vision globale, pour perdre l’oeil du spectateur. Puis, le point de vue s’éloigne, un dézoom s’opère et petit à petit on commence à avoir une vision d’ensemble de l’installation dans la forêt. Pour finir par le passage de mon corps, lointain et invisible, une signature en quelque sorte.

Quelques captures d’écrans pour montrer l’évolution visuelle du film:

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En ce qui concerne le choix du titre « AntiSaturn », il faut faire appel à nos connaissances sur cette planète.

Il y a une mise en opposition entre l’instant de la vidéo, plutôt calme avec un vent très léger et la vie sur Saturne où les vents peuvent atteindre 1800 kilomètres par heure. De plus, il règne une agitation permanente, sur ses anneaux, faite de vagues, de collisions et d’accumulations de matières, alors que l’on fait face ici, à un paysage de contemplation. Extraire un moment de vie du temps commun compté en chiffre minute.

Le jour baisse, le temps avance et l’on perd la lumière de Ce jour pour aller vers le prochain, sans l’angoisse de la finitude, comme un arbre qui pousse.

Céline Broudin

 

Sténopé 2.0

Sténopé : « Un appareil photographique à sténopé se présente sous la forme d’une boîte dont l’une des faces est percée d’un trou minuscule qui laisse entrer la lumière. Sur la surface opposée à cette ouverture vient se former l’image inversée de la réalité extérieure, que l’on peut capturer sur un support photosensible, tel que du papier photographique. Comme l’œil, le sténopé capture des images inversées du visible. »

                          

Mon projet de départ :

Au début du projet j’ai eu la même idée , mais en découpant la photo en forme géométrique comme ici :                                                                                                  http://www.flickr.com/photos/vincent-radzinski/sets/72157632200225610/                         Mais après des recherche j’ai vu que les formes ont certaine signification et je ne voulais pas fausser l’idée de ce que je voulais montrer, de plus cela aurait gêné à la lecture des images.

 

Le risque et le hasard :                                                                                                   j’ai créé pour ce projet 20 sténopés mais seulement sept ont été récupérés dans un état exploitable.                                                                                                                         -10 sténopés ont été placés en ville ( Paris, Compiègne, Crépy-En-Valois)                            -10 autres ont été mis en place en foret (Crépy-En-Valois)                                                   Dans ce genre de procéder il y a une grande par de hasard dû au vent, une mauvaise exposition et les éléments extérieures qui peuvent intervenir sur la boite, et c’est tout le procédé expliquer dans la vidéo qu’il faut recommencer. Il faut donc faire plusieurs essais avant de pouvoir un résultat convenable.

Mais aussi le risque de se voir faire dérober ses sténopés, sur les dix sténopés qui ont été mis en ville seul trois ont été récupérés les autres ont été enlevés.                                           Mais aussi les sténopés mis en foret quatre étaient bien caché le reste a été enlevé ( j’ai dû aller récupérer mes sténopés en mairie et les ouvrir en gendarmerie).

 

La confrontation des deux milieux :                                                                                 j’ai voulu confronter ces deux environnements (Ville/Nature) pour montrer les mouvements dû au temps.                                                                                                                       Nous voyons bien que dans la forêt le temps est comme stoppé, calme et paisible (quand je suis rentré dans la forêt pour aller poser mes sténoses j’ai eu l’impression d’y être resté dix minutes alors que trois heures c’était écoulé).                                                                      Pour ce qui est de la ville je voulais montrer le fourmillement des gens pressés par le temps ce qui a pour but de créer des filets sur l’image.                                                                   Les personnes sont pressés par le temps et exécute leur cycle journalier (métro-boulot-dodo).

 

La spirale :                                                                                                                      Pour moi la spirale est un cycle qui se répète à l’infini et je me suis beaucoup penché sur le disque de Phaistos (disque en argile cuite, découvert en 1908 a phaistos en crête et datent du deuxième millénaire) il représente une énigme pour les archéologues, mais a plusieurs hypothèses comme celle d’Allan Butter en 1999 qui dit qu’il s’agirait d’un calendrier a 366 jours , mais qui aurait pour « simple idée » d’être un calendrier ce qui m’a beaucoup intéressé car une journée est cyclique et ce reproduit tout au long des mois et des années.

Disque de Phaistos

Disque de Phaistos

Mais elle représente aussi la progression du temps qui est  « figé dans un sténopé » on pourrait même dire que le sténopé a fait une contraction du temps (un jours ou deux ) dans une image fixe.                                                                                                             J’ai donc voulu recréer grâce à cette spirale le cycle temporel d’une journée à l’aide des températures de couleur en kelvin.                                                                                       Partant de 2000 kelvins au le lever du soleil en passant par 6000 kelvins a Midi ou le soleil est au plus haut puis le coucher du soleil ou on retombe a 2000 kelvins et enfin la nuit (mais après la nuit le soleil se lève).

Température de couleur en Kelvin

Température de couleur en Kelvin

 

La Post production :                                                                                                         Le travail de post production a été de faire une correction colorimétrique de chaque image et en augmentant la netteté des images sous photoshop afin d’avoir le maximum d’information sur l’image, Puis j’ai regroupé les images par deux pour les confronter comme une double exposition scindé en leur milieu .                                                                                         j’ai ensuite implanté une spirale que j’ai colorisé selon la température de la journée et diminuer sont opacité pour la rendre présente, mais pas trop visible.

Post Production

Post Production

Voici les images après les retouches, le nettoyage et l’accentuation des détails :

      Sténopé 2.0  Spirale Colorimétrique

Sténopé 2.0

      Sténopé 2.0  Spirale Colorimétrique

Sténopé 2.0

      Sténopé 2.0  Spirale Colorimétrique

Sténopé 2.0

 

Le Déchiffrement du disque de Phaïstos – J. Faucounau

 

 

Spin Spin Spin

Lien

Comment le temps est-il représenté dans la vie? C’est démontré par l’aspect de transition d’un moment à l’autre. C’est fait par la progression. C’est une autre dimension, fascinante et mobile. Le temps continue, et il fait de la progression qui pousse vers le futur. L’idée est simple, mais fascinante parce que le temps n’est pas concret dans le sens qu’il n’est pas tangible. On peut trouver des représentations et des machines qui enregistrent le temps, mais le temps comme matériau n’existe pas. Il trouve son existence par sa progression. C’est certain qu’il existe, car nous vivons dedans. Afin de le définir, nous tentons d’en faire des représentations pour essayer de le saisir et d’en comprendre l’idée et la réalité. Le temps est sa propre dimension.

SPIN SPIN SPIN- (Mon Film)

Le début du temps commence dans l’espace. La vidéo commence dans le noir puis avec une lumière en arrière plan. Une boule de lumière qui tourne. J’ai accompli cet effet grâce à une technique, en plaçant mes mains serrées devant l’objectif de la caméra. Puis comme une danse de mouvements j’ai fait des rotations de la main. C’est un hommage au « Big Bang ».
Un Coquillage est une spirale formée par la nature. J’ai tourné la caméra et fait des rotations avec l’image. La bicyclette, comme une spirale, fait des tours dans l’espace et continue vers le futur. J’ai focalisé vers les mouvements, les roues, et leurs motions. La séquence suivante montre des voitures et des bicyclettes en mouvement vers l’avant. Dans cette situation les effets de liquéfaction d’image aident pour que les mouvements soient plus simples. La vitesse est réelle. Elle n’est ni ralentie ni accélérée. J’ai choisi d’organiser les séquences afin que les yeux suivent un parcours. La dernière voiture est blanche, et j’ai décidé de suivre cette séquence avec un linge blanc qui tourne dans un sèche-linge. La séquence suivante montre du linge qui tourne dans un lave-linge. Puis un ventilateur de plafond, qui tourne en rotation dans le même sens que la machine à laver. Je termine avec la bicyclette qui tourne dans la
même direction que le ventilateur.

J’ai appliqué des effets sur la couleur intégrale du film. J’ai ajouté du jaune pour avoir des images plus chaudes et donner un effet lumineux. Ensuite il y a une liquéfaction de l’image pour voir plus simplement la forme et les mouvements des séquences.
La rotation des clips a été faite avec la notion de la spirale aussi en relation avec Spiral Jetty.
La Musique commence avec un son de sauterelles pour arriver à un sens de mouvement.

THE MAN WITH THE MOVIE CAMERA

« Spin Spin Spin » se focalise sur la séquence de l’action, et sur comment l’action et le mouvement se déplacent dans le temps et dans l’espace. De même manière que dans “The Man With The Movie Camera,” mon film, lui aussi, suit un mouvement d’une séquence a l’autre. D’un clip à l’autre, l’œil suit le mouvement de l’action, et dans le clip suivant, le mouvement débute là où s’était arrêté le clip précédent.
C’était important de dépeindre la vie quotidienne dans mon film. Les machines filmées sont des objets d’aujourd’hui, une réflexion de notre temps. Comme dans le film de Vertov ils ont utilisé des machines des les années 20, « Spin Spin Spin » prend des images de notre époque. La technologie change comme la mode, restant une réflexion de chaque époque.
Le film de Vertov: « The Man With The Movie Camera », est un exemple excellent pour voir l’existence, le temps, et la technologie. La machine, avec certains rythmes est un objet qui montre bien la progression et le déroulement du temps.

ROBERT SMITHSON- SPIRAL JETTY

Spin Spin Spin

La spirale est un élément clé dans mon film, inspiré par le film « Spiral Jetty » de Robert Smithson.
«Un œil «entropique » aurait dit Robert Smithson, qui pratiqua la spirale à l’infini, dans ses dessins comme dans son installation de Spiral Jetty. Si bien, qu’ancienne ou contemporaine, la spirale semble défier le temps.» Christine Buci‐Glucksmann

Bibliographie:
Umberto Eco- Le Temps De L’art
Les spirales du temps : de l’immémorial à l’éphémère, Christine Buci-Gluksmann
Video de “Spiral Jetty” http://www.robertsmithson.com/films/films.htmThe Man With The Movie Camera Dziga Vertov (1929) http://www.youtube.com/watch?v=8Fd_T4l2qaQ (Preview)

Sans titre: (une plume blanche, un arbre déraciné, un fossile)

 

Le présent document écrit se présente comme un élément complémentaire au travail pratique, à savoir la réalisation d’une vidéo intitulée « Sans titre : (une plume blanche, un arbre déraciné, un fossile) » dont la matière principale est une performance dans le Bois de Vincennes. Le dossier comprend trois parties : le texte de présentation et le témoignage du processus de création – et le lien pour la vidéo -, la contextualisation historique et théorique et, pour finir, la bibliographie de recherche.

 

Texte de présentation et témoignage du processus

 

Quatre éléments, plus précisément, une plume blanche, une coquille rose, un fossile et un arbre déraciné, trouvés en novembre 2013 sur la plage de Visby, la capitale de Gotland (- la plus grande île de la Suède -), constituent le matériel d’inspiration qui m’a mis au travail de cette performance.

Le vendredi 1 novembre 2013, lors d’une marche matinale au bord de la mer, j’ai d’abord failli marcher sur la coquille d’un rose délicat avant de tomber, quelques mètres plus loin, sur un fossile qui porte l’empreinte d’une spirale, d’une précision telle qu’on pourrait parler d’un dessin. Quelques minutes plus tard, je fais la rencontre de cet arbre déraciné. Stimulée par cette contingence additionnée et par ces présences naturelles fortes, je ramasse, cette fois-ci de manière intentionnelle, une plume blanche à proximité de de l’arbre. Puis, je m’approche de l’arbre pour toucher son écorce avec mes mains. Touchée par la vue et l’odeur de la mer, le cri des mouettes et la sensation tactile du vent et de l’arbre, je m’assois sur l’arbre et commence à écrire. En résulte le poème qui, non seulement introduit la performance dans la vidéo mais encore, constitue, ensemble avec les ingrédients  trouvés sur la plage, les éléments initiaux de mon travail sur « Le temps comme matériau ». Le poème qui clôt la performance date d’une promenade dans les mêmes lieux le jour avant la trouvaille des éléments.

Tout au long de mon séjour en Suède, et plus particulièrement sur l’île de Gotland, la force d’éléments naturels, tels que la mer, le vent et la roche ainsi qu’une terre peu habitée par l’Homme, a animé et nourri ma réflexion sur le temps, sur sa substantialité et sa matérialité. Je me suis rendue compte de ce caractère double du temps lors de la lecture de l’ « Avant-propos de la seconde édition »  de ‘Le désir et le temps’ de Nicolas Grimaldi – lecture faite avant mon voyage en Suède.[1]

De retour à Paris, j’ai écrit la partition pour une performance. J’ai soumis cette dernière, ensemble avec deux photos, une de l’arbre déraciné et l’autre d’un assemblage fait d’éléments naturels, dont la coquille, le fossile et la plume, aux participantes de la performance.

partition (A) partition (B)

arbre déraciné

assemblage

Le choix de la performance, – mieux, du corps -, comme médium s’est imposé à moi dès le départ. Le mouvement d’un corps a lieu dans un cadre spatio-temporel. La naissance et le devenir du mouvement se déploient dans une con-naissance avec le temps et l’espace, alors inséparablement liés. Je reviendrai sur la nécessité artistique de l’ancrage dans le temps, réel, présent, et dans l’espace, voire de l’ancrage du temps dans l’espace – et ceci non sous une représentation spatiale linéaire du temps – dans la deuxième partie du dossier.

Le souffle est l’essence même du mouvement. Chaque mouvement est engendré par le voyage d’un souffle dans un corps. Le mouvement porte ce souffle dans le monde des choses visibles. Du point de vue d’un spectateur, ou encore d’un témoin –  je préfère le terme ‘témoin’ proposé par Anna Halprin, une des pionnières de la performance, qui implique une attitude bienveillante et de soutien face à la personne en mouvement[2] -, nous pouvons aussi parler d’extériorisation du souffle. Le corps dansant, lui, est dans une sensation double de son intériorité, animée par le voyage de son souffle, et de l’extériorité qui est cette image d’un corps en mouvement dont il est le générateur et l’observateur.

L’espace (textuel) ici accordé au souffle s’explique par son importance en termes de matière d’action dans la partition. La suspension (volontaire) de la respiration entraîne l’annulation de toute possibilité de mouvement, l’arrêt de tout principe de mouvement, interne et externe.[3]

 


[1] « Mais si on accepte de reconnaître le temps comme la substance, tout de même que le désir n’est élancé vers l’avenir que parce qu’il est enraciné dans le présent, de même alors faut-il aussi penser que c’est dans la matérialité même du présent que le temps fait fomenter l’inventive et inquiète tendance à la futurition : le temps est le travail de la médiation qui ne cesse de s’immédiatiser dans la matière. Qu’il faille concevoir à la fois la matérialité et la substantialité du temps : telle était donc la principale thèse de ce livre. »

[2]Halprin Anna, Mouvements de vie, 60 ans de recherches, de créations et de transformations par la danse, Contredanse, Bruxelles, 2009 [édition augmentée et traduite de Moving Toward Life, Five Decades of Transformational Dance, 1995]

p.292 « Je ne veux pas de spectateurs. L’existence de spectateurs sous-entend un spectacle mis en œuvre pour les distraire, les amuser et éventuellement les aiguillonner un peu. Ce que je veux, ce sont des témoins qui aient conscience que nous dansons dans une certaine intention, à savoir laisser une marque dans nous-mêmes et dans le monde. Nous faisons tout ce que nous pouvons pour créer d’authentiques rituels contemporains. Le rôle du témoin est de comprendre la danse et de soutenir les danseurs qui ont entrepris la tâche ardue de se produire. »

[3] Voir la partition

Voici la vidéo:

 

Sans titre: (une plume blanche, un arbre déraciné, un fossile) from Anne Wirth on Vimeo.

 

Contextualisation historique et théorique

 

Trois domaines différents, qui s’articulent en tant que plans semi-transparents superposés, m’inspirent, m’influencent et me guident dans mon travail pratique. La danse contemporaine et la performance constituent un premier domaine, la philosophie un autre, la psychologie un troisième.

Il me semble important de remarquer que l’ordre dans lequel ils apparaissent ci-dessous est contingent. En réalité, il n’y a pas d’ordre qui instituerait une hiérarchie interne si ce n’est un ordre chronologique se rapportant aux moments dans le temps, linéaire, où j’ai fait connaissance de tel penseur ou tel chorégraphe.

Commençons par la danse contemporaine et la performance. Anna Halprin, Myriam Gourfink, Yoko Ono, Nadia Vadori-Gauthier et Laurence Louppe ont été particulièrement importantes pour ce projet. Je cite Anna Halprin, danseuse et chorégraphe américaine, pour son travail de pionnière dans la performance. Elle était une des premières à s’engager pour rendre la danse accessible à tout le monde. Au-delà de son travail de démocratisation, elle a majoritairement influencé la performance contemporaine américaine et française en proposant les « RSPV-Cycles » (acronyme pour ‘Resources’, ‘Score’, ‘Valuation’, ‘Performance’) comme méthode de travail qui inclut la création, l’exécution et l’évaluation d’une partition.[1] Myriam Gourfink, danseuse et chorégraphe contemporaine française, m’a imprégné dans ma manière de proposer aux performeurs des images poétiques afin de créer un imaginaire qui donne naissance à la qualité du mouvement.[2] A cet endroit, je cite Yoko Ono, également une des pionnières en performance, et son livre Grapefruit : A book of instructions and drawings by Yoko Ono, pour son incitation à la mise au travail et à la mise en action quotidiennes de manière à ce la frontière entre l’art et la vie devienne plus perméable. Vient ensuite s’ajouter Nadia Vadori-Gauthier, performeuse et doctorante en Esthétique, Sciences et technologies des Arts à l’Université Paris 8 Saint-Denis, pour le travail que j’ai pu faire avec elle, que ce soit dans le cadre de cours théoriques et pratiques sur la performance dispensés à l’Université Paris 8 ou dans le cadre d’un Atelier de création et de recherche mené au studio Le Regard du Cygne, sur la présence, la sensation et l’affect, et leurs interactions possibles. En dernier lieu, je relève l’historienne de la danse Laurence Louppe qui a forgé mon regard sur la danse contemporaine et, en passant, sur les arts visuels, notamment à travers sa « Lecture du temps ».[3]

La question du temps et de sa lecture, voire de son invention possible selon Laurence Louppe, me permet de faire le lien avec le champ philosophique. Deux domaines, celui de la phénoménologie avec, comme représentant,  notamment, Maurice Merleau-Ponty et celui de la philosophie sociale et de la sociologie contemporaine avec l’allemand Hartmut Rosa, ont nourri ma réflexion théorique. Ce dernier parle d’un sentiment généralisé de « compression du temps » ainsi que d’un « manque d’appropriation du temps » (- « nous échouons à faire du temps de nos expériences « notre » temps » -)[4]. Dans ma création artistique, je souhaite soutenir un sujet dans l’invention de son rapport au temps (- plutôt que de parler d’invention du temps tel que le propose Louppe -). Je propose une mise en valeur du temps présent, comme vécu personnel, comme inscription corporelle dans le vécu. Aussi puis-je parler d’une con-naissance du mouvement et du moment, défini dans ses caractéristiques spatiales et temporelles. Un ‘comment’ du mouvement qui est précisément construit dans le présent, dans le moment même. Maurice Merleau-Ponty dit dans Phénoménologie de la perception : « Le sujet de la sensation n’est ni un penseur qui note une qualité, ni un milieu inerte qui serait affecté ou modifié par elle, il est une puissance qui co-naît à un certain milieu d’existence ou se synchronise avec lui. »[5]

A ce même sujet, Erwin Straus, chercheur allemand qui a contribué à la psychopathologie et à la psychiatrie clinique et qui a cofondé la psychologie phénoménologique, nous dit : « Sentir est une expérience empathique. En sentant, nous nous éprouvons nous-mêmes dans le monde et avec le monde. ». Et encore : « Le corps est le médiateur entre le Je et le monde, il n’appartient ni pleinement à l’ « intérieur » ni à l’ « extérieur ».[6]

Ainsi, à l’époque où les Hommes tombent malades du temps, (mécanique, scientifique), nous pouvons, à travers réhabilitation de la sensation et à travers la présence au présent, retrouver, voire même peut-être revaloriser, la force poïétique du temps.

 


[1] La partition est une liste d’actions à effectuer qui dit quoi faire mais pas comment faire.

[2] Je cite Jérôme Bel dans la Préface du livre de Magali Lesauvage et de Céline Piettre, (dir.), Myriam Gourfink – Danser sa créature, Les presses du réel, Paris, 2011 : « Ensuite – et c’est là où j’ai compris que le travail de Myriam Gourfink était véritablement exceptionnel et novateur -, elle m’a demandé de penser à certaines choses et de faire correspondre ces pensées à chacune des respirations qui sont autant de mouvements. Elle a écrit une partition de pensées, qui a été produite de deux manières. Soit elle me demandait à quoi je pensais dans le temps des mouvements, soit elle me disait à quoi je devais penser. Ses propositions – se concentrer sur le bout de mon nez, visualiser l’espace entre mon cerveau et ma boîte crânienne – s’ajoutaient aux miennes, plus personnelles : l’intérieur de mon corps devenait entièrement bleu, mon cerveau se liquéfiait et jaillissait du haut de mon crâne comme une fontaine, le mur en face de moi se déplaçait de quarante-trois centimètres vers la gauche… » (p.11)

[3] Un chapitre entier est dédié au temps (« Lecture du temps ») dans son livre Poétique de la danse contemporaine. Je retiens plus particulièrement : « Depuis les matières organiques, miel ou graisses mis en masse ou en jeu par Beuys, les couleurs en mutation de Jean-Pierre Bertrand, etc., on sait que les arts dits visuels ont intégré le temps comme agent d’œuvres évolutives. Mais il s’agit d’un temps physique ou biologique, qui va agir selon ses propres lois. Pas un temps créé, compressé, dilaté, un temps ‘produit’ par les choix délibérés d’un sujet qui invente son temps. Car pour inventer le temps, il faut soi-même en sécréter la matière. Créer les figures de temps (durées ou instantanéités, dynamiques temporelles, ou couches pures de toutes dynamiques) mais surtout à travers elles faire surgir le temps comme force poétique. » (p.145)

[4] Rosa Hartmut, Beschleunigung und Entfremdung. Entwurf einer Kritischen Theorie spätmodener Zeitlichkeit, Suhrkamp, Berlin, 2013; trad. fr. Thomas Chaumont, Aliénation et accélération: vers une théorie critique de la modernité tardive, La Découverte, Paris, 2012, p.132

[5] Merleau-Ponty Maurice, Phénoménologie de la perception, Editions Gallimard, France, 1945, p.256

[6] Straus Erwin, Vom Sinn der Sinne, Springer Verlag, Berlin, 1935; trad. fr. G. Thines et J.-P. Legrand, Du Sens des Sens. Contribution à l’étude des fondements de la psychologie, Editions Jérôme Million, collection Krisis, Grenoble, 1989, pp. 333, 393

 

Bibliographie

 

Le corps collectif, La meute. Un devenir du corps collectif, France, 2013

Grimaldi Nicolas, Le désir et le temps, Vrin, France, 1992

Halprin Anna, Mouvements de vie, 60 ans de recherches, de créations et de transformations par la danse, Contredanse, Bruxelles, 2009 [édition augmentée et traduite de Moving Toward Life, Five Decades of Transformational Dance, 1995]

Leibniz Gottfried Wilhelm, Discours de métaphysique. Monadologie, Editions Gallimard, France, 2004

Lesauvage Magali, Piettre Céline, (dir.), Myriam Gourfink – Danser sa créature, Les presses du réel, Paris, 2011

Louppe Laurence, Poétique de la danse contemporaine. Troisième édition complétée, Contredanse, Bruxelles, (1997) 2004

Macel Christine, Le temps pris. Le temps de l’œuvre, le temps à l’œuvre, Coédition Monografik/ Centre Pompidou, France, 2008

Merleau-Ponty Maurice, Phénoménologie de la perception, Editions Gallimard, France, 1945

Ono Yoko, Grapefruit : A book of instructions and drawings by Yoko Ono(1974), Simon &Schuster, New York, 1970

Rosa Hartmut, Beschleunigung und Entfremdung. Entwurf einer Kritischen Theorie spätmodener Zeitlichkeit, Suhrkamp, Berlin, 2013; trad. fr. Thomas Chaumont, Aliénation et accélération: vers une théorie critique de la modernité tardive, La Découverte, Paris, 2012

Straus Erwin, Vom Sinn der Sinne, Springer Verlag, Berlin, 1935; trad. fr. G. Thines et J.-P. Legrand, Du Sens des Sens. Contribution à l’étude des fondements de la psychologie, Editions Jérôme Million, collection Krisis, Grenoble, 1989

 

 

Mémoire-sédiment, matérialisation d’une durée

Au début de l’année 2013 j’ai fait dans une performance à partir des images qui apparaissaient avec une certaine répétition dans mon esprit et en conséquence sur mes travaux ultérieurs. Alors j’ai voulu creuser ces « images-souvenirs », savoir  quelle était leur nature et pourquoi ces images, qui étaient pour la plupart de mon enfance, m’étaient toujours présents.

performance

Après avoir vécu ses images dans une performance, avec la participation des mes amies, j’ai pu avoir une certaine distance par rapport à ces images et commencer à les travailler sur un plan plus objectif dans la tentative de comprendre une chose qui me dépassait et m’intriguait.

Mon premier pas était de mieux comprendre le passage d’une chose virtuelle à l’état matériel, c’est-à-dire, de ces images de ma mémoire à une forme/action concrète dans le réel. Les auteurs dont j’ai pu trouver qui parlent de ce processus, sont Henri Bergson et Gilles Deleuze. En approfondissant mes études j’ai pu découvrir le processus de création et la théorie du temps comme une durée telle qu’elle a été mise en avant par Bergson, où les temps  du passé, du présent et de l’avenir sont (existent) tous en même temps. Une continuité des répétitions.

A la base, mon travail était très personnel car c’étaient des images de mon esprit. J’avais du mal à faire participer l’extérieur, et cela me posait des problèmes. C’est alors que je me suis ré-engagée dans la recherche sur l’image-souvenir, la mémoire, le passé qui est présent et le processus qui se concrétise dans la matière. J’ai cherché dans la nature, et plus précisément dans les pierres, qui sont les éléments de la nature les plus anciens, surtout les roches sédimentaires dont la nature/matière propre est de la mémoire pure du temps qui ne cesse de passer.

Dans cette recherche j’ai utilisé des outils comme Google Earth pour pouvoir étudier les marques, les empreintes et les textures de la terre et de ses rythmes de formation de la matière, pour avoir des pistes dans ma production artistique. Avec cet outil j’ai pu voyager de la Sibérie à la Patagonie, de l’Amazonie au désert du Saare. Toutes ces images m’ont stimulé beaucoup et m’ont fait repenser le monde à plusieurs reprises et surtout m’ont donné plusieurs idées pour pouvoir commencer à travailler la matière.

Voici une partie des documentations que j’ai fait de ce voyage dans les images du satellite de Google:

googlemaps

Dans la recherche d’une démarche formelle dans l’art, plusieurs artistes m’inspirent comme : Giuseppe Penone, Tony Cragg, Frank Kupka, Constantin Brancusi, Joseph Beuys, Jang Kwang Bum, Pierre Huyghe, Tunga, Robert Smithson, Koo Jeong A. et Yayoi Kusama.

Quelques-uns de ces artistes je connais depuis longtemps dont certaines des œuvres ou processus de création m’intéressent particulièrement pour ce projet sur le temps, d’autres j’ai découvert dans ma recherche actuelle et sur le extraits du livre Le temps pris de Christine Macel.

Cette recherche formelle a pu me guider dans mes premiers essais dans lesquels j’ai commencé en faisant des dessins dans plusieurs formats qui ressemblent à des cartographies et des topographies. Cependant, tout de suite, je suis partie  faire des sculptures  car les dessins exprimaient clairement des volumes et des textures que je devais mettre en œuvre par le biais d’une troisième dimension.

C’est drôle pour moi, qui travaille plutôt la peinture, d’aller presque directement vers la sculpture. Même en sachant que le cours demandait un travail de vidéo, je ne pouvais faire autre chose que des sculptures-maquettes d’idées que j’ai pu approfondir dans mes essais et lectures.

La recherche de la matière était essentielle pour faire avancer mon travail pratique et théorique. En travaillant sur modelage des couches, des formes et des pensées ont commencé à se mettre en place. Ces objets étranges, qui ont un côté géologique mais en même temps très naïf et organique, ont pris la place dans ma pratique et j’ai fait plusieurs essais.

Voici des photos des essais pratiques que j’ai pu faire pendant cette période :

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Crayon sur mon Sketchbook, 20 cm x 10 cm.

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Crayon sur mon Sketchbook, 20 cm x 10 cm.

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Encre de chine sur parier 220 gm, 297 mm x 420 mm.
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Aquarelle sur parier 220 gm, 297 mm x 420 mm.

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Sans titre: (temps comme matériau), acrylique sur coton, 108 cm x 122 cm.

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Pâte modelé, environ 25 cm x 16 cm x 8cm.

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Pâte modelé et acrylique, environ 15 cm x 6 cm x 4 cm.jhgpq

Pâte modelé et acrylique, environ 13 cm x 3 cm x 3 cm.

 

La vidéo de documentation de mon travail :

 

Ma vidéo de documentation de cette recherche est un mélange de plusieurs techniques montrées au long du cours avec une inspiration des vidéos montrées au cours. Pour le côté didactique de ma documentation, l’artiste Chris Marker m’a influencé par sa façon humoristique concevoir ses documentaires.

Pour la présentation de mon projet, j’ai utilisé la voix de Google traduction. Toutes les images, sauf les photos de mes travaux,  je les ai trouvé sur Google images. Ce choix d’avoir les contenus d’images et de sonorité vient d’un simple constat d’une réalité qui fait partie de la vie contemporaine et mondialisée et comme étudiante étrangère je suis confrontée avec cette réalité presque tous les jours.

Le discours fait par le philosophe Gilles Deleuze sur le processus sensori-moteur de Henri Bergson est un extrait d’un des ses cours de 1982. Ce discours a un rôle de documentation de mon quotidien comme étudiante en Arts à Paris 8 et ce qu’il dit fait un résumé pour moi de ce qui était le début de ma recherche.

Comme le temps était si court afin d’arriver à développer mon idée de recherche jusqu’au bout, j’ai limité mon travail de recherche théorique à deux livres : Matière et mémoire de Henri Bergson et Le bergsonisme de Gilles Deleuze.

Dans la deuxième partie de la vidéo j’explique le schéma du cône de Bergson qui est en quelque sorte un résumé du contenu entier du livre Matière et mémoire. Dans ce cône il va montrer où et comment la mémoire est dans l’esprit, quelle est sa connexion avec le monde réel et comment la mémoire se réactualise dans le présent et peut se matérialiser dans le réel.

La fin de la vidéo est une présentation des rendus formels de ma recherche avec un fond sonore que j’ai spécialement composé à cette fin.

Comme nous pouvons voir, mon projet n’est pas fini. J’aimerai continuer à le travailler dans le cadre de mon Projet tutoré et, éventuellement, dans le Master. J’ai pris beaucoup de plaisir à faire cette recherche et à commencer à développer une pratique plastique.  C’était évident que mon idée était très prétentieuse par rapport au temps que nous avons eu, mais le désir de cette recherche était plus fort que l’envie de vraiment aboutir à quelque chose.