-- Projets artistiques pour l'espace public I » sandra & marcuss

Piscine Guyne-mer

Article publié le : Vendredi 6 janvier 2012. Rédigé par : Sandramarcuss

NOTE D’INTENTION
Nous logeons actuellement à la résidence guynemer du Crous de Saint Denis. La résidence contient plus de 5 centaines de chambres simples et doubles pour étudiants et un jardin central pauvre en végétation. Il y a au milieu de ce jardin une surface creuse d’environ 18 mètres de long pour 12 mètres de large et allant jusqu’à 1 mètre 50 de profondeur. l’existence de cette forme mais aussi son emplacement et sa possible contenance attirèrent notre curiosité. D’autre part, la résidence ne présente à ce jour aucun lieu en commun ou espace de rencontre. Beigeâtre et Massive vue de l’exterieur ,elle présente en son coeur une quantité remarquable de couloirs aux tons gris et bleu pâle. Notre intention fut de modifier le parcours des gens au coeur de ces couloirs dans le but de provoquer le dialogue, l’observation et la rencontre. Proposer une vision de l’espace collectif comme champ de réinterprétation de notre réalité.

LA FAILLE
Ce que nous appelons une faille en architecture est comparable au Bugs ou «espaces perdus» des jeux vidéos. Ce que nous appellerons La faille est un grand creux, Il ne présente aucune justesse géométrique car ses angles ne sont pas égaux et sa structure, proche de ressembler à un rectangle aux angles arrondis est imparfaite: un type de construction qui n’a jamais aboutie. Probablement une fosse sceptique. Elle est située au beau milieu du jardin central. Lors de notre passage vers la seconde partie du bâtiment, nous pouvons avoir pleine vue sur cet immense trou. Compte tenu de sa position architecturale et de sa forme on pourrait bien imaginer une piscine. D’autant plus qu’il s’agit du seul espace vert que comprend la résidence: physiquement et littéralement axial. Chaque jour plus de 500 étudiants passent a côte de ce jardin sans se donner le temps de le parcourir. Il devient ainsi un endroit non habité et quasiment stérile. Nous déciderons d’habiter ce trou monumental d’une projection vidéo lumineuse de la mer. Clé de voute entre les continents, la mer désigne la circulation libre et naturelle des eaux sur l’ensemble du globe. Aussi n’a t on pas dit pendant plus d’un siècle «peuples d’outre mer» en parlant des étrangers? La mer se pose ici comme étrangère à toute chose et à tout individu quelque soit sa provenance: Une confrontation qui pourrait amener les habitants du lieu à partager, comme au cinéma, l’espace d’un instant.


REPERAGE
Avant de nous lancer dans l’élaboration complète du projet, nous avons procéder à un repérage multiple. Recherches Internet sur les lieux; leur signification et leurs auteurs. Nous avons ensuite photographier le terrain de multiples points de vue. Afin de calculer la faisabilité de la projection, nous avons pris les mesures des lieux avec un mètre et l’intensité lumineuse présente de nuit à l’aide d’un Luxmètre. Nous avons élaborer l’un l’autre croquis et petites esquissesa1 afin de réfléchir esthétiquement le cadre de la projection et par conséquent de mieux se le figurer et l’intégrer. Enfin, nous avons aborder de nombreux habitants ou employés de la maison en leur demandant leur avis sur le jardin de la résidence et leur appréhension du trou vert. La plus part, pour rigoler, disaient y voire la possibilité d’ une piscine. Grâce à ces démarches qui contribuent dés le départ à créer un certain type de dialogue avec l’autre, nous avons pu définir notre dispositif et établir son système de fonctionnement, les matériaux à utiliser ainsi que le coût approximatif de l’opération.

     

INTERACTIVITE

L’apparition d’un eau lumineuse et mouvementée au sein du jardin central s’active au passage de l’individu dans le couloir vitré reliant deux compartiments de la résidence l’un à l’autre. Expliquons le simple principe d’interactivité dont il est question: – Pour passer du bâtiment 1 au bâtiment 2 il faut emprunter une première porte A dans le couloir . – On se retrouve alors dans le couloir vitré en zone T ou l’on peut voire le centre du jardin, – On pousse alors la porte B pour traverser ce couloir. Dés lors, il n’est plus possible de voire quoi que ce soit: le mur de béton nous entraîne vers la suite du bâtiment 2 d’ou on prend l’ascenseur pour accéder aux 5 étages. Lorsque nous poussons la porte A, un capteur de présence placé au plafond transmet le signal au vidéo projecteur placé au 5ème étage et alimenté depuis notre chambre L’image est alors projetée en plein centre du jardin et le son de la mer est déclenché sur la longueur de la zone T grâce à 2 petites baffles discrètes et murales.

MAQUETTE
Afin de mieux rendre compte du rendu de l’oeuvre et afin de solliciter les moyens nécessaires à sa réalisation, nous nous sommes attelés à la conception et construction d’une maquette interactive en papier et carton . La maquette est à une échelle d’1/200 . le revêtement des bâtiments est fait des photographies que nous avons pris de ces mêmes bâtiments. Le gazon et sa faille sont reproduits en carton vert. Les vitres des bâtiments sont partiellement faites de papier calque semi-opaque ou jaunie. Le surface de la faille est en acétate: une surface transparente pour la réflexion lors de la projection, une deuxième bleue pour simuler la couleur de la projection. A la facon des boîtes d’optiques «mégaléthoscopes », la maquette repose dans une boîte noire qui nous permet d’y controler la lumière ambiante2. La lumière émanante des bâtiments est fournie par une lampe électrique blanche. La lumière du jour et la projection sont deux lampes à Led alimentées par des piles. Lors du visionnage de la maquette, toutes les lampes sont activées. En désactivant la lumière Led du jour, nous voilà en pleine nuit. Il ne nous reste plus qu’à tirer une languette pour voirre apparaître la projection. Nous avons également commencer à créer un parcours virtuel en trois dimensions de l’oeuvre et de son fonctionnement sur google sketchup.


 
 

L’INQUIETANT FAMILIER
C’est en 1919 que Freud introduit la notion d’inquiétant familier(1), pour designer dit-il, «une chose à laquelle la vie de l’âme est accoutumée depuis toujours et que seul le processus du refoulement a éloigné d’elle». Cette impression, ce sentiment, cet événement de choc pour l’esprit, est très généralement provoqué par un grand nombre d’oeuvres contemporaines qu’elles soient plastiques, cinématographiques, musicales ou littéraires. Simone Korff-Sausse explique ceci par le fait que les nouvelles technologies «provoquent de véritables mutations et produit des situations inédites». Sans s’éloigner de ces technologies mais sans pour autant rentrer en relation avec la recherche scientifique, l’apparition de l’élément mer que nous voulons transposer en ces lieux aurait tendance à provoquer l’inquiétude pour ce qu’il active dans notre mémoire : un passé, une sensation de liberté qui n’existe que dans les souvenirs et qui ne pourrait donc, par définition, ne plus jamais exister. Néanmoins, le contraste entre l’image mer et son environnement urbain pourrait symboliser l’espoir, la promesse d’un projet futur ou provoquer le sourire de l’étonnement. Cependant, deux choses bien définies viennent préciser notre objectif: la première est le fait que l’image est projetée dans un cadre précis : celui du trou. On pourrait aussi bien dire que l’oeuvre est hors

 

cadre mais la mer qui est représentée dans l’image projetée est clairement délimitée; rectangulairement parlant. En effet, nous ne tenons pas à faire croire que la
mer est là mais plutôt que l’apparition de son image en suggère la possibilité. La seconde idée est celle d’apparition-disparition, et qui inclut en sois une dimension temporelle propre à l’oeuvre. D’ailleurs, l’image n’apparaît que lors du passage d’une vie humaine. Elle apparaît pour freiner l’individu dans son élan de rapidité mais aussi pour provoquer sa contemplation puis, disparaît aussitôt. Dans ce cas, mirage et miracle peuvent coexister. C’est par son apparition au sein d’une erreur architecturale que La Piscine Guynemer, a la fois étrangère et familière à quiconque, monumentalise son contenant et s’impose comme un message de masse volontairement pacifique.
S+M
                                                                                                                                                                                      
1- L’hypothèse que veut prouver Freud est que le retour du refoulé suscite une inquiétante étrangeté, mais qu’en réalité il s’agit de quelque chose de familier. L’inquiétant familier(suivi de Le marchand de sable, E.T.A Hoffmann), S.Freud, preface par Simone Korff-Sausse, 2011, Édition Payot et Rivages, tr. de l’allemand par Olivier Mannoni.