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Site archéologie

Article publié le : Jeudi 31 mai 2012. Rédigé par : Kyoo-seok Choi

1. La Défense

La Défense est une ville fondée sur les bétons en couvrant l’ancien terrain. C’est une des raisons que cette ville semble une ville sans histoire. Autrement dit, à la Défense, il semble que le passé a été effacé, et qu’il ne reste que le présent ou le présent du futur[i]. Cette ville peut être un résultat de la réalisation de plusieurs projets architecturaux, en fait elle semble ressembler à un grand projet lui-même. À la Défense, on pourrait sentir, on est entré dans un espace virtuel qui illusionne un grand projet architectural[ii].

2. Espace public

À la Défense, il semble qu’il y a partout des espaces publics comme le parc, le lieu mémorial, et le lieu pour l’art ; malgré tout, dans cette ville, je sens que je ne fais pas partie de public. Ces lieux peuvent être des espaces de reposer pour des gens qui y habitent ou travaillent, ou des espaces de visiter pour des touristes ; ces lieux semblent des espaces préparés pour ces fonctions, donc fixer et limiter son usage par le projet de la ville. Dans ces espaces, ce n’est pas facile de trouver le sens communicatif et politique de l’espace public[iii]. Paradoxalement, dans une ville où il y a partout des espaces publics comme la Défense, on pourrait remarquer que l’espace public ne signifie pas toujours un espace qui est ouvert à tout le monde. Plutôt ces espaces pourraient fonctionner pour effacer l’histoire et pour cacher un certain caractère de la Défense : un lieu excrément privatisé. Si l’espace public est ouvert pour tout le monde, ces espaces ne serraient pas d’abord des lieux pour des gens qui ne possèdent pas leurs espaces privés ? À la Défense, des gens qui demandent la nourriture ou l’argent s’installent des endroits plus coincés que des autres quartiers, ils sont donc moins visibles.

3. Site Archéologie

Le titre de projet « Site archéologie » est métaphorique[iv] ; Site archéologie est un lieu où les archéologues travaillent pour chercher des objets ou des bâtiments anciens qui pourraient avoir une certaine valeur historique. Si dans un espace, certaines traces particulières sont découvertes, le sens de cet espace pourrait changer, même si la fonction de cet espace a été déterminée comme les espaces publics de la Défense. On peut imaginer certaines activités qui permettent de trouver ou retrouver un sens communicatif ou politique pour ces espaces.

4. Préparation

Le sens de l’espace public pourrait être changé par rapport au sujet qui y est. Dans l’espace public de la Défense, je suis un des publics, et quelqu’un qui veut réinterpréter le sens de cet espace. L’activité de la réinterprétation est limitée par la spécificité du sujet. Par exemple, je suis un étudiant étranger non un artiste connu, donc pas de budget disponible ; dans cette limite, j’ai choisi une façon de la réalisation du projet dont je fabrique quelques objets, et puis je les pose, en anonyme[v], dans certains espaces publics de la Défense.

 

Les objets : 1.Peinture, 2. Sculpture, 3. Manuscrit gravé sur la plaque argentique, 4. Manuscrit gravé sur la plaque cuivrique (les photos ci-dessus de gauche à droite 1-4)

Le premier et le deuxième objet portent les visages. Le troisième objet est une citation gravée sur la plaque argentique sans indiquer la référence : « Si le visage est bien le Christ, c’est-à-dire l’Homme blanc moyen quelconque, les premières déviances, les premiers écarts-types sont raciaux : homme jaune, homme noir, hommes de deuxième ou troisième catégorie. Eux aussi seront inscrits sur le mur, distribués par le trou. Ils doivent être christianisés, c’est-à-dire visagéifiés. Le racisme européen comme prétention de l’homme blanc n’a jamais procédé par exclusion, ni assignation de quelqu’un désigné comme Autre : ce serait plutôt dans les sociétés primitives qu’on saisit l’étranger comme un « autre ». Le racisme procède par détermination des écarts de déviance, en fonction du visage Homme blanc qui prétend intégrer dans des ondes de plus en plus excentriques et retardées les traits qui ne sont pas conformes, tantôt pour les tolérer à telle place et dans telles conditions, dans tel ghetto, tantôt pour les effacer sur le mur qui ne supporte jamais l’altérité (c’est un juif, c’est un arabe, c’est un nègre, c’est un fou…, etc.).[vi] » Dans le quatrième objet, le texte de citation est gravé, également sans indique de la référence : « La vrai frontière à remettre en question se situe entre la douleur muette et le désespoir du véritable étranger. L’art peut-il servir à passer ce type de frontière de façon expressive, interrogative et révélatrice ?[vii] »

5. Réalisation

Le premier objet a été posé sur le muret, dans un endroit entouré par la plante grimpante, autour d’un passage. Le deuxième objet a été posé, avec un mis en scène, dans un endroit entouré  des routes sous le pont. Le premier espace est un endroit construit pour les publics du coup il a y beaucoup de fréquentation des gens. Le deuxième espace est plutôt un endroit  délaissé, après avoir fini d’autres constructions, autour duquel il n’y pas de gens en revanche, beaucoup de véhicules y circulent. Le troisième objet a été posé devant un monument pour la Grande Arche, où il y a beaucoup de passages. Quatrième objet a été posé dans la sculpture Slat (2007) de Richard Serra où il n’y a pas de gens, mais également beaucoup de véhicules circulent.

6. Propos sur l’intervention

L’intervention a été faite dans chaque espace d’une manière différente, mais aussi en construisant un contexte sur ce projet. Le premier objet a été posé comme un objet perdu ; deuxième objet a été mis comme un objet trouvé par quelqu’un[viii]et  qui paraît une annonce dont il y aurait prochaine intervention. Le texte gravé sur le troisième objet porte une réflexion sur le visage, il peut être donc une réflexion sur la première et la deuxième intervention. Selon le point de vue de racisme européen, il n’existe pas des autres ; s’il y a pas des autres, il n’y aurait pas de problème de la discrimination. Une certaine manière, les espaces publics de la Défense ressemblent le visage d’Homme blanc que Deleuze a décrit : ces espaces sont établis en effaçant les traces anciennes, et ils effacent le sens communicatif et politique de l’espace public[ix]. Le texte gravé sur le quatrième objet porte une question sur la frontière et l’identité, et s’interroge, qu’est-ce que l’art peut faire devant ces questions ; que porte ce projet lui-même. Le choix des endroits pour le troisième et le quatrième objet a été fait pour reconstruire un contexte entre les espaces, l’identité, et l’art ; le troisième a été posé dans un lieu central de la Défense[x], et le quatrième a été posé dans une œuvre d’art, donc l’intérieur ou l’extérieur de l’espace public.

 

Référence :

François Bourgineau, Art et argent les liaisons dangereuses, édition Hugo & Compagnie, 2009.

Gilles Deleuze, Felix Guattari, Mille plateaux, Paris ; Les éditions de minuit, 1980.

Giovani Donfrancesco, Les authentiques fausses têtes de Modigliani, (document, 53 min), 2011

Thierry Paquot, L’espace public, Paris ; La découverte, 2009.

Paul Virilio, La machine de la vision, Paris ; Galilée, 1988.

Krzysztof Wodiczko, Art public, art critique, Textes, propos et documents, Trad. de l’anglais par M. Herpe-Volinsky et du polonais par W. Kolecki, Paris ; École nationale supérieure des Beaux-Arts, 1995.

Defacto.mag, N° 13, janvier 2012, (téléchager par le site www.ladefense.fr)


[i] Paul Virilio remarque, de nos jours, les trois temps (passé, présent, futur) se substituent deux temps : le temps réel et le temps différé. Le temps réel « contient à la fois une partie du présent et une partie de futur immédiat. ». Voir Paul Virilio, La machine de la vision, Paris, Galilée, 1988, p. 140.

[ii] Par rapport des projets architecturaux de la Défense, il y a un critique remarquable, voir François Bourgineau, Art et argent les liaisons dangereuses, édition Hugo & Compagnie, 2009, p. 162. « La passion de Jean Nouvel pour le cinéma explique peut-être le projet : vivre dans un décor de villes superposées. La Défense est issue d’un urbanisme sur dalle, il propose de rajouter des dalles pour imaginer l’espace public en hauteur. »

[iii] Selon Thierry Paquot, « L’espace public est un singulier dont le pluriel — les espaces publics — ne lui correspond pas. En effet, l’espace public évoque non seulement le lieu du débat politique, de la confrontation des opinions privées que la publicité s’efforce de rendre publiques, mais aussi une pratique démocratique, une forme de communication, de circulation des divers points de vue ; les espaces publics, quant à eux, désignent les endroits accessibles au(x) public(s), arpentés par les habitants, qu’ils résident ou non à proximité. » Voir Thierry Paquot, L’espace public, Paris ; La découverte, 2009, pp. 3-4.

[iv] Pensons le Canular de Livourne : les sculptures de Modigliani sont retrouvées dans un canal, et l’exposition a été organisée, et les critiques ont écrit des articles ; plus tard, trois étudiants ont révélé que c’est eux qui ont réalisé une de ses sculptures. Voir Les authentiques fausses têtes de Modigliani, réalisé par Giovani Donfrancesco, 2011.

[v] Avec la signature, ces interventions peuvent être identifiés tout de suite comme un des projets dans un domaine de l’art. Sans indication de la propriétaire, les objets pourraient porter un sens ambiguë qui demande de rechercher pour savoir de quoi s’agit-il. Sur les textes, un jour, on pourrait trouver ou découvrir leurs références.

[vi] Gilles Deleuze, Felix Guattari, Mille plateaux, Paris, Les éditions de minuit, 1980, p. 218.

[vii] Krzysztof Wodiczko, Art public, art critique, Textes, propos et documents, Trad. de l’anglais par Michelle Herpe-Volinsky et du polonais par Wojciech Kolecki, Paris, École nationale supérieure des Beaux-Arts, 1995, p. 221.

[viii] Contradictoirement, le visage de la première peinture est comme un masque, celui de la deuxième sculpture est comme un visage perdu.

[ix] Les images de la Défense sont souvent médiatisées ainsi  : dans une revue sur la Défense, un acteur raconte une expérience qu’il a été à la Défense : « J’’adore le quartier de La Défense ! Avec son business centre, tous ces gens bien habillés qui se croisent au pied des immeubles, à la terrasse des cafés… Ça bouge toute la journée, j’ai l’impression d’être aux États-Unis et je suis fan ! J’apprécie particulièrement cette image des films américains, avec une super jolie fille, journaliste, qui travaille dans une tour et tombe amoureuse d’un mec hyper classe. », Defacto.mag, N° 13, janvier 2012, p. 2.

[x] Le contenu du texte gravé sur ce monument est ainsi : « Ce monument a été édifie de 1983 à 1989, sous l’autorité de a société d’économie mixte nationale tête défense, maître de l’ouvrage présidée par Robert Lion, […] »