L’espace du métro demeure un lieu d’expérience et de sensations, mais c’est aussi un moyen d’échapper au quotidien à travers deux parcours : un parcours pair (effectué dans chacune des lignes pairs du métro parisien : les lignes 1, 3, 5, 7, 9, 11, et 13) et un parcours impair (correspondant aux lignes impairs du métro : les lignes 2, 4, 6, 8, 10, 12, 14). En guise de témoignage, ces parcours ont été doublement matérialisés par des photographies et des vidéos. Les deux parcours ont été dans un premier temps publiés sur Internet, une manière d’évoquer la fluidité et la mouvance de notre société contemporaine. Partout on parle de fluidité, mot devenu à la mode et qui dénote une absence de frontières. Il n’y a rien d’étonnant à ce que nous tenons à travailler dans des frontières souples et perméables, et ce désir explique l’essor de projets artistiques pouvant prendre n’importe quelle forme, se produire n’importe où et comme le dit Tiravanija, comprendre « beaucoup de monde ». Cette forme d’art témoigne donc d’une approche ouverte en ce début de nouveau millénaire. Dans ce contexte, le spectateur détaché dont parle Descartes, et relié à « la froideur bourgeoise » évoquée par Adorno n’existe plus. Articulé autour d’images numériques, négligeant l’épaisseur et le poids du matériau, des cartes et des indications relatives au jeu de piste sont donc consultables à loisirs sur la page Facebook : « https://www.facebook.com/#!/events/175024152644108/» Lisses et glacées. Propres et polies. Il s’agissait de proposer au spectateur l’image la plus parfaite qui soit. Comme un journal de bord, Facebook au fil des jours se nourrie de l’expérience des uns et des autres. Le voyageur commence par prendre conscience du circuit et se rend au lieu de rendez-vous avec les indices nécessaires pour atteindre son objectif.
Parcours impair et parcours pair
Ces deux parcours ont pour vocation de transporter le voyageur dans le monde de l’imaginaire et de la rêverie, hors du quotidien et de la monotonie du métro parisien. L’usager n’est plus passif, victime d’une tache laborieuse qu’il se doit d’accomplir quotidiennement, mais devient par les biais de ces deux jeux de piste, l’acteur et le héro de sa propre histoire. Pour les deux parcours, une carte du métro est donnée en guise d’indice, dont les lignes ont été remplacées par des fils, en référence au fil d’Ariane dans le labyrinthe. Le but n’était pas qu’elle ressemble exactement à la carte du métropolitain mais qu’elle évoque d’avantage cette idée de mouvance et de flânerie.
Dans le parcours impair, la dimension textuelle et langagière est fort importante puisque le jeu de piste est basée sur la narration : « Une femme a été retrouvée inerte et amnésique sur le quai d’une station de métro. Dans les poches de son manteau on récupéra quelques fleurs desséchées et un fatras de documents […] La femme a laissé derrière elle plusieurs indices : une carte, une fleur de lilas, une page déchirée venant d’un conte pour enfant. »
Ainsi ces éléments sont censés aider le voyageur dans sa quête. Une carte, un conte pour enfant et du lilas ont été aussi publiés sur la page. La page déchirée venant d’un conte pour enfant retrace l’histoire de cette femme dont le voyageur ignore encore l’identité. Ce récit évoque au fil de la narration certaines stations, choisies en fonction de leur évocation aux songes et aux rêves (Maison Blanche, Sentier, Lilas..)
Page tirée du conte pour enfant, retrouvée dans la poche de la femme amnésique
Dans son ouvrage Le métro revisité, Marc Augé cite les noms de stations qui enfant favorisaient son imagination et sa rêverie « La poésie du métro c’était d’abord la poésie des noms, parfois parce qu’elle évoquait une époque révolue et une campagne disparue » [1] Les noms des stations utilisés ont pour seul but d’éveiller la curiosité du passant et de le transporter dans un monde imaginaire. Le voyageur devra alors se rendre le jour J aux stations indiquées dans l’ordre de la narration afin qu’il y découvre à chaque fois un nouvel indice. Il sera guidé dans sa quête par une femme mystérieuse avec des lunettes noires et un imperméable beige qui l’attendra à chaque étape sur le quai d’une station afin de lui rendre un autre indice. Ces indications lui permettront de comprendre la suite du récit et de relier ensemble toutes les pièces du puzzle. La première personne qui publiera sur la page Facebook la morale de cette histoire sera désigné comme vainqueur du parcours impair. Si Thésée remonte le fil d’Ariane, le petit Poucet retrouve ses cailloux, l’usager est à même grâce à ces indices de mener l’enquête.
Photos du parcours impair, réalisé à Paris le lundi 10 décembre entre 19h et 21h. Le rendez-vous a été fixé à 19h, devant l’entrée principale de l’opéra Garnier (à proximité de la ligne 7 où commençait l’enquête) :
Transportés dans le monde des contes de fées les participants du parcours pair, qui se mettent dans la peau d’un preux chevalier, doivent effectuer une quête afin d’aider le roi Godefroy Le Barbu à récupérer sa couronne magique et à délivrer sa fille la princesse Madeleine des mains de l’affreux Mage Noir.
Voici l’intrigue de l’histoire : « Il était une fois, dans un royaume lointain, le roi Godefroy le Barbu qui régnait en paix parmi les siens. Le roi était connu pour sa gentillesse et son altruisme envers son peuple. Afin de le remercier de sa bienveillance, les reines fées du royaume voisin, lui avait fait cadeau d’une couronne magique dotée d’un sortilège lui assurant prospérité et longue vie. Avec sa femme Genièvre, ils eurent une fille : Madeleine. A sa naissance, le Mage Noir aux sourcils d’argent, dont la réputation maléfique était connue de tout le royaume, vint leur rendre une visite : le roi devait lui donner sa couronne magique, ou sa fille allait être enlevée à l’année de ses dix huit ans, et gardé prisonnière dans le donjon de son château hanté pour l’éternité. Le roi refusa, et le chassa de son royaume. Il lui fallait désormais protéger sa fille. Mais en dépit de ses efforts, le matin de son dix-huitième anniversaire la princesse Madeleine fut enlevée par une armée de corbeaux d’argent. Le même jour deux vipères dorées, pénétrèrent dans le château du roi et lui subtilisèrent sa couronne magique. Cette atrocité fut l’œuvre de l’horrible Mage noir aux sourcils d’argent. Le roi et la reine furent propice à un chagrin foudroyant, et à mesure que leur tristesse grandissait, la peste s’emparait du royaume. Il fallait que quelque chevalier lui vienne en aide et vite ! »
C’est à la suite de cette histoire que la quête commence. Pour chaque étape du parcours, les participants à l’aide d’une carte du métro comme celle utilisée dans le parcours pair, doivent résoudre des énigmes dans lesquelles se trouvent le nom d’une station pair à deviner. Les noms faisant référence à la féérie et à l’imaginaire des contes : « Boissière », ligne 6; « Chemin vert », ligne 8, « Château rouge », ligne 4, « Couronne », ligne 2, etc… Les énigmes sont données aux participants sous la forme d’un parchemin fermé par un ruban rouge, qui leur est donné à chaque étape par un personnage du moyen-âge appartenant à l’époque du roi Godeffroy le Barbu.
Par ce jeu de piste, le métro parisien, n’est dans ce contexte plus associé à une corvée quotidienne, mais il devient ici un noble destrier, que vont chevaucher les participants pour cheminer d’une étape à une autre dans leur périlleuse quête semée d’embuches (une pyramide à escalader pour la station Pyramide, ligne 14; ou et un dragon à combattre pour la station Château Rouge, ligne 4). Par le biais de cette quête, ce derniers effectuent un voyage à travers le monde de la rêverie, leur faisant oublier la morose réalité du métro, transformé en terrain de jeu.
Photos du parcours pair, réalisé à Paris le samedi 15 décembre entre 14h et 17h. Le rendez-vous a été fixé à 14h, en haut des ascaliers de la sortie du métro Montgallet (à proximité de la ligne 6 où commençait la quête) :
On a envie de participer! A quand un nouveau parcours?
Merci! On en fera certainement d’autres encore plus élaborés cette fois-ci!
J’veux y participer aussi. Avec les mêmes médiatrices, bien sûre
Avec les mêmes ! le duo de choc ^^
Je voulais participer, je mettais d’ailleurs inscrite sur la page Facebook mais les horaires ne correspondaient pas avec mes dispos. Le prochain sera le bon j’espère!
Oui c’est certain en semaine ce n’était pas évident pour tout le monde! Mais on en refera un prochainement et on vous tiendra au courant