Vue de l’exposition « Arlequine » de Karina Bisch à la Galerie des Galeries, Galeries Lafayette Paris, avril 2015, crédits photographiques : Lisa Tietze

Quand vous pensez au carnaval, vous pensez probablement aux masques, aux tissus colorés et aux arlequins, mais pas aux Galeries Lafayette. Pourtant c’est ici que vous pouvez ressentir une atmosphère carnavalesque jusqu’au 9 mai encore à travers le travail de Karina Bisch. La Galerie des Galeries, localisée au premier étage des Galeries Lafayette, a donné carte blanche à la peintre pour s’emparer de son espace.

Vous entrez dans l’exposition « Arlequine » par la traversée d’un tunnel, peint entièrement en noir. Une fois de l’autre côté, le visiteur plonge dans un univers total : « Je voulais que le spectateur soit dans la peinture », dit l’artiste et a recouvert l’ensemble des murs de l’espace d’une toile de 70 mètres de long peinte à la main de multiples motifs géométriques en noir et blanc. Des fenêtres créées dans la toile laissant apparaître des peintures colorées et énergiques : des ronds, des triangles, des mains jouent avec le regard. Au milieu de l’espace, six personnages revêtus de tenues créées par l’artiste, rappellent le personnage d’Arlequin et des figures de théâtre. Ces six mannequins sont des spectateurs qui ne quittent jamais l’exposition, qui l’habitent en permanence, mais aussi qui, d’après l’artiste, l’activent. Elle leur attribue le rôle de maintenir de l’attention et de la tension[1]. Chacun porte le prénom d’une figure des courants modernes du 20e siècle : Gustave, Varvara, Sonia, Giacomo, Pablo et Ellsworth. Un clin d’œil de Karina Bisch allant du cubisme orphique au minimalisme.

Détail de l’exposition « Arlequine » de Karina Bisch à la Galerie des Galeries, Galeries Lafayette Paris, avril 2015, crédits photographiques : Lisa Tietze

L’artiste, qui a fait les Beaux-Arts de Paris, s’inspire de la période moderniste des avant-gardes et de ses ramifications jusqu’à la période contemporaine. Dans le corpus des formes qu’elle utilise, elle compte principalement les formes géométriques, mais aussi la forme humaine. Bien que Karina Bisch se considère comme peintre, ses œuvres relèvent également de la sculpture, de l’installation et de la performance. « Elle a réussi à dépasser les frontières de la toile pour atteindre aussi le costume et se poser la question de savoir jusqu’où pouvait agir la peinture », dit Elsa Janssen, directrice de la Galerie des Galeries. Les Galeries Lafayette ont déjà invité l’artiste l’année dernière pour décorer une vitrine avec sa collection « Painting for living », une collection entièrement créée à la main avec laquelle l’artiste souhaite traiter des frontières entre l’art et le design. Pour l’exposition « Arlequine », Karina Bisch a prévu de créer une nouvelle collection qui prendra en motif des détails d’œuvres. De cette manière, le spectateur pourrait « porter » l’exposition.

 Avec l’exposition « Arlequine », l’artiste nous invite dans un monde dominé par des formes et des couleurs vives, qui fait référence à ses plus grandes influences et fait preuve de l’intérêt qu’elle porte à la couleur et au motif et à son talent de les manipuler. Néanmoins, nous devrons constater que les réalités du lieu interfèrent avec ses idées, même si nous voyons très bien ce que l’artiste a voulu créer : la toile est coupée de nombreuses fois et donne vue sur des portes et des placards, une climatisation bourdonne sans arrêt, le son de l’eau qui coule dans les tuyaux se fait entendre dans nos oreilles et notre nez est préoccupé par une odeur industrielle répandue dans tout l’espace. Aucun de ces éléments n’est en lien avec l’œuvre de Karina Bisch, malheureusement chacun d’entre eux enlève une couche de cette atmosphère carnavalesque.

Nous ne perdons pourtant pas notre humour carnavalesque ! L’art de Karina Bisch vaut néanmoins le détour. Avec l’exposition « Arlequine », la Galerie des Galeries Lafayette reste fidèle à sa politique de mise en valeur de la transversalité qui existe entre la mode, les arts plastiques et le design. Le spectateur y trouvera, entre le 4 mars et le 9 mai 2015, une exposition rythmée par l’univers coloré de l’artiste Karina Bisch et teintée de références à l’histoire de l’art.

Lisa Tietze

Pour plus d’informations sur le site de la Galerie des Galeries

[1] « Making of de l’exposition “Arlequine” », sur le site Galerie des Galeries, consulté le 20 avril 2015, http://www.galeriedesgaleries.com/frFR/exposition/i-50/arlequine.html