Géraud Soulhiol

par Marisa Serrano-Sanchez

Géraud Soulhiol explore le paysage avec humour et poésie. Il prend pour thèmes de ses œuvres la nature, où il questionne les notions d’espace, de territoire, de cartographie. À partir d’un travail plastique qui se développe par le dessin, le photomontage ou l’impression 3D, Soulhiol se livre à un exercice d’imagination à partir du réel. Ses paysages s’inspirent de la nature. Il les recompose, les manipule, les oriente. Puis il les isole, les détourne, les répète mécaniquement, créant un rythme, une cadence qui s’étale par la surface du papier. Il fabrique des « psychogéographies » ou cartes mentales où chaque spectateur récrée sa propre histoire. Ces espaces sont souvent vus de haut, travaillés d’un point de vue éloigné, manifestant l’envie de tout vouloir représenter. En même temps quelque chose d’irréel s’installe. La présence humaine n’y est pas, si ce n’est par celui qui regarde. Son dernier travail, Huit Hectares Quarante-Six, est une composition murale réalisée par photomontage où se superposent différents travaux de dessin, à la manière des strates géologiques. La première strate est formée par une carte créée à partir de capture d’écran de Google Earth, de vues aériennes d’un paysage naturel. Le titre, énigmatique, dénote l’étendue d’une surface géographique qui est en rapport avec son enfance. C’est le nom inscrit sur le cadastre d’un petit terrain, un bout de forêt dans le Lot qui appartient à ses grands parents où il allait se promener quand il était petit. En donnant ce nom à l’œuvre, Soulhiol a voulu attacher des souvenirs qui lui sont chers à ce travail sur la nature.

Habilement manipulée, cette carte trahit l’exactitude. Le paysage recomposé n’existe pas, il donne l’allure du réel. Il devient un territoire imaginaire. Ce jeu des apparences se rapporte également aux dessins qui forment la deuxième strate. Le premier est une affiche qui reproduit avec plus ou moins de poésie ou d’humour le travail mécanique d’arbres qui se rapporte à un travail antérieur. C’est de la fausse nature. Le deuxième dessin est une chaîne de montagnes qui parcourt le bord circulaire de la marie-louise qui l’entoure et qui crée une sorte de contre-monde qui peut faire penser de manière conceptuelle à l’égocentrisme et à l’héliocentrisme. Le troisième dessin représente des clôtures, des petits territoires fragmentés qui pourraient s’étendre et envahir tout l’espace de la feuille. Il choisit comme médium le papier et le porte-mine, mais pas seulement. Ses dessins d’arbres se présentent aussi sous forme de café soluble sur sous-tasses en porcelaine, une technique peu commune qui montre l’éclectisme du jeune plasticien. La monumentalité du paysage est traitée par le biais d’un dessin en miniature, dans un travail presque rétinien. Le spectateur est ainsi invité à se rapprocher pour observer l’étendue. « Pour faire entrer le spectateur dans un travail en miniature il faut y mettre de la tension, de la patience et créer du détail » nous a-t-il dit. La qualité de son trait attire l’attention. On y trouve le goût pour le détail, la minutie et la rigueur. Fabricant de vues, Géraud Soulhiol nous interpelle par ses œuvres, non dénuées d’humour et de fantaisie, jouant avec la perception tout en subtilité.

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