Hiroshi Sugimoto,  » Accelerated Buddha  »

 

La Fondation Pierre Bergé – Yves Saint Laurent

10 octobre 2013 – 26 janvier 2014

 

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Vue de l’exposition

Vue de l’exposition

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Hiroshi Sugimoto, Accelerated Buddha, 1997-2013, vidéo.

Il ne reste qu’une semaine pour découvrir l’exposition présentée à la Fondation Pierre Bergé – Yves Saint Laurent à Paris Accelerated Buddha de l’artiste japonais Hiroshi Sugimoto. Ce dernier a profité de la carte blanche qui lui a été offerte par la fondation pour concevoir une exposition incitant à réfléchir aux origines et aux finalités de l’Histoire, de la civilisation et de la spiritualité.

Hiroshi Sugimoto, né en 1948 à Tokyo, partage sa vie entre le Japon et les Etats-Unis, où il a étudié la photographie dans les années 1970. Son œuvre pluridisciplinaire – photographie, sculpture, installations, architecture –, est marquée à la fois par les inspirations orientales et occidentales, par les va-et-vient incessants entre ces deux types de rapports au monde, qui, au bout de compte, sont transcendés par les mêmes interrogations. C’est justement ce que l’exposition Accelerated Buddha scénographiée par l’artiste lui-même fait ressentir.

L’exposition se déploie à travers trois salles du premier étage de la fondation, débutant par un petit espace introductif : un texte de présentation au mur rédigé par Sugimoto et, à côté, une vitrine murale donnant à voir une lithographie sur rouleau avec une image de la cascade sacrée de Kegon. La cascade ou la source est un symbole qui se prête à de multiples interprétations universellement partagées ; ainsi, on ne peut pas s’empêcher de s’attendre au commencement d’une histoire, avec des sentiments mitigés mêlant curiosité, révérence et une angoisse confuse.

Ces sentiments se renforcent dès la première salle du parcours qui, allongée et plongée dans la pénombre, se présente comme la nef d’un temple. En effet, les rangées de grandes vitrines murales éclairées de l’intérieur et placées des deux côtés de la pièce se font solennellement face, à l’instar des chapelles ou niches avec des statues de divinités. Ici, elles abritent des artefacts se référant à différents signes et symboles, issus de diverses époques et régions, l’artiste ayant choisi de présenter ses productions avec des objets antiques de sa collection personnelle. Cette imbrication de la contemporanéité et des arts traditionnels où l’on ne saurait faire une distinction nette entre les deux crée un terrain de rencontre entre diverses mentalités et narrations.

La même approche se poursuit au fil du parcours dans la deuxième salle qui met en regard des objets anciens (masques de théâtre) et les grandes photographies argentiques de l’artiste représentant des vues des statues de Boddhisattva du temple de Sanjûsangendô de Kyoto. Cette obsession première de Sugimoto qu’est le temps et son écoulement prend ici un côté dramatique qui ferait écho à notre civilisation sur la voie du déclin.

Enfin, le propos atteint son point culminant avec Accelerated Buddha, installation vidéo occupant la troisième et dernière pièce de l’exposition. Par un procédé d’accélération progressive des clichés, le spectateur voit les mille bouddhas du temple de Kyoto se multiplier jusqu’à un million en cinq minutes et puis se fondre et disparaître soudainement. Pour l’artiste, cela illustrerait la fin de toute civilisation, qui s’accélère au fur et à mesure qu’elle approche du déclin. La nôtre, elle aussi, semble avoir déjà entamé sa course vers la fin programmée. Mais parviendra-t-elle à rompre le cycle de la naissance et de la mort et à atteindre un état d’illumination perpétuelle ? A en juger d’après l’ambiance créée par l’exposition, ce n’est pas du tout certain. En ce sens, la démarche de l’artiste-commissaire est réussie, car cohérente avec son dessein de mettre l’humanité en garde et de l’amener à se remettre en question.

Arina Gueimor

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