Projection dans le temps de la conférence de >>>>>Still Life, des extraits de >>>>>des Rives as a performance et de >>>>>Tu, Sempre.

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Yann BEAUVAIS_Décadrer le cinéma_La conférence_3e partie>>des Rives as a performance
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____Parallèlement (34:44)
à ce travail sur le SIDA, j’effectue depuis plusieurs années un travail qui met en scène d’une autre manière la simultanéité (34:54): par la fragmentation d’images et leur juxtaposition visuelle, par exemple des images de villes qui sont imbriquées les unes dans les autres et qui proposent un certain type de films. En 1997 aussi, j’ai pu réaliser quelque chose d’un peu plus complexe, une spatialisation de ces films de paysages ou de villes. Cette spatialisation, c’est à la fois une installation et une performance des Rives. Elle consiste à la fois à mettre la ville de New York dans l’espace, dans un espace particulier que vous allez pouvoir arpenter dans tous les sens mais aussi de pouvoir créer une performance dans le cadre de l’installation, à un moment donné. Cette installation vient de ce fait que, depuis longtemps, j’essaie d’imbriquer des plans séparés d’un même objet ou d’un même lieu simultanément. je pense que chacun parmi vous, avez eu des fantasmes d’enfant. Il m’a fallu quarante ans pour faire quelque chose que je souhaitais faire depuis que j’étais enfant: des essuie-glace en image. Comment faire bouger une image en essuie-glace et qu’est-ce que c’est qu’envisager le monde en ou sous essuie-glace. Je vous propose de voir et ensuite de vous donner des éléments de compréhension sur ce que cela a à voir avec les arts plastiques contemporains.
[Projection en zapping d’un document filmé de l’installation des Rives (38:25>>44:58), on a une image soit plein cadre qui donne ce qu’on voit sur les écrans et des plans d’ensemble sur l’installation, où l’on voit qu’il y a deux grands écrans]

____La particularité de ce travail,

c’est qu’en fonction des lieux proposés, je crée, comme beaucoup d’autres artistes le font, des présentations particulières. Ici, en 199, à Genève, c’était un lieu avec une verrière et un miroir suspendu. Dans les cubes blancs, au CREDAC d’Ivry, en fonction de ces lieux, je détermine la taille des écrans, leur emplacements par rapport aux entrées, la répartition du son. Ce sont deux films en 16 mm projetés sur des écrans de rétro projection. Il est important qu’on puisse tourner autour, entrer dans l’image, que l’ombre du visiteur soit incluse dans l’image comme quelque chose qui masque l’image et non comme un ajout (dans le cas du projecteur vidéo tri tubes). Il est important aussi de pouvoir introduire le rapport humain dans le cadre de la projection, c’est à dire introduire un rapport au corps, simplement par le fait qu’on puisse se balader dans l’espace, ou que les images sont spatialisées, que vous pouvez les contourner, vous immerger dedans d’une certaine manière, avec l’appui du son. Cela permet un rapport qui me semble assez dynamique et qui transforme ce qu’on entend par ce que c’est qu’un film: il se passe une chose très simple, il n’y a ni début ni fin. Il y a deux boucles, une de neuf minutes, une de huit minutes trente. Les copies de films sont changées tous les dix jours en fonction de la poussière des lieux.

____Les films tournent non stop,
et vont produire des relations, des rapports, de temps en temps des essuie-glace vont jouer d’un écran à l’autre... Sur chacune des deux boucles, vous n’avez pas tout à fait la même chose. Pendant des années, j’ai tenté de faire ça avec des cartes postales, image par image (48:50), mais il manquait cette fluidité filmique qui donne cette possibilité d’avoir comme la reproduction du réel dans le tiers de chacune des images, et de choisir ce que vous allez regarder. Ce qui se passe assez fréquemment, c’est que vous allez privilégier un des motifs par rapport aux autres. Cette installation a la particularité de pouvoir se transformer à tel moment ou à tel autre en une performance. Ce que j’aime bien, c’est ne pas en rester aux choses fixées. En général, il est peu admis qu’on touche aux appareils de projection de cinéma, mais certains cinéastes se sont fait une spécialité de le faire: non seulement ils vont toucher les appareils de projection (par exemple verser de l’eau de javel ou tout autre produit sur l’appareil en état de marche, afin de transformer la chose vue au moment même où elle se déroule...).

____...à l’encontre du fait que le film c’est quelque chose d’enregistré.
Il y a d’autres manières d’intervenir, en modifiant au moyen de votre objectif ou des appareils de projection, la vitesse, la luminosité... Vous commencez ainsi à dynamiser l’objet, à créer un événement cinématographique particulier. Cette installation des Rives se transformait de temps en temps en performance, ou ne devenait qu’une performance: j’apportais une batterie de projecteurs et avec des musiciens, on commençait à travailler en direct, afin de “débrayer” cette installation. Ce qu’il y a d’intéressant avec le film, c’est de prouver qu’on peut faire quelque chose qui va à l’encontre du fait que le film est quelque chose d’enregistré, qui apparemment n’est plus modifiable. Montrer qu’au sein du film, on peut tout modifier et le faire en direct (51:35), avec tous les aléas de ce direct (pannes de projecteurs...) On peut se trouver soudain dans une situation où l’urgence de l’événement cinématographique prime sur l’enregistré et dans ce cas-là, ce n’est tant la restitution qui importe pour l’auteur, que le fait de se trouver dans un autre statut, de même que le regardeur se trouve dans une situation qui n’est plus celle de la totale réception lisse. (52:44)

____Avec cette installation,
une de celles où je mettais des images dans l’espace, pour moi s’est posée la question: comment se fait-il que très souvent, les plasticiens contemporains, à part quelques uns, travaillent toujours la frontalité, pourquoi, comme à la Documenta XI, vous entrez toujours dans une boîte, vous vous dirigez vers le mur du fond où il y a l’image projetée. Comme vous êtes dans un lieu d’art, il n’y a pas de siège... Est-ce pour que vous ne prêtiez pas attention à l’image. Pourquoi l’image est-elle si frontale, si vous ne devez pas y prêter attention, c’est un paradoxe. Pourquoi créer des espaces d’art qui soient des chambres noires ou des boîtes blanches dans lesquelles on ne devrait pas prêter attention à l’image et pourquoi y-a-t-il toujours l’image au fond de la boîte, bien cadrée? Certaines galeries peuvent proposer semaine après semaine, des installations-vidéo dans le même archétype de la boîte noire.

____La question de savoir où l’image va apparaître?
Qu’est-ce qui est en jeu là? (54:25) C’est comme s’il n’était plus question de poser des questions sur la place de l’image, sa réception. Pourquoi l’art contemporain évacue-t-il cela?. Si je me réfère à la tradition du cinéma expérimental, je m’aperçois que lorsque les cinéastes pensent les installations, utilisent les multi-écrans, pour eux, s’est toujours posée la question de savoir où et dans quel espace allait se situer l’image. Est-ce qu’elle doit être vraiment au fond, doit-elle être biface, ou avoir deux faces distinctes? Pourquoi ne pas envisager d’autres rapports à l’image? Pourquoi n’y-a-t-il que Gary HILL, Bill VIOLA, Diana THATER... qui se posent la question de savoir où l’image va apparaître? Je repère que certains cinéastes expérimentaux se sont posés ces questions, les ont résolues d’une certaine manière. Il est évident que très souvent, on pense qu’une installation peut être aussi une performance. Si je voulais être un artiste contemporain, et là j’emploie le terme de manière péjorative, je ferai un document de la performance et je vous en laisserai les restes comme objets... à consommer. Cela a peut-être à voir avec le fait qu’il est important que l’image soit toujours au fond, parce qu’au moins elle est source de pouvoir et d’autorité vis à vis du regardeur. Le rapport que vous pouvez avoir avec ces images est un rapport d’autorité.


>>>>>>>>>>>>vers la quatrième partie de la conférence>> vers Tu, sempre
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