Projection dans le temps de la conférence de >>>>>Still Life, des extraits de >>>>>des Rives as a performance et de >>>>>Tu, Sempre. | Biographie | Le site de Yann | La Ménagerie de verre | un lien inattendu | |
Yann BEAUVAIS_Décadrer le cinéma_La conférence_1ère partie>> le cinéma expérimental ||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| Préambule: 1_[La conférence de Yann BEAUVAIS se déroule devant un auditoire détudiants en arts plastiques, assez ignorant en matière de cinéma expérimental. Pour Yann BEAUVAIS, la gageure est de nous introduire au cinéma expérimental, à travers une étude de cas dun cinéaste particulier_lui-même_soit litinéraire dun corpus de trois oeuvres_de la pellicule filmique à la vidéo numérique_du SIDA (Still Life, 1997)au SIDA (Tu Sempre, 2001), avec un entre-deux paysager urbain (Des Rives, 1997)_ soit encore lexpérience du cinéma retrouvé, voire dun cinéma interactif.] 2_[Nous avons retranscrit ses propos oraux, dans leur flux, avec peu de modification, et cette mise en ligne est faite sans relecture préalable de lauteur. Les phrases longues conservent la fluidité de l'élocution et s'accordent au mode de lecture fluide à l'écran. Cest pour nous un document de travail, modifiable si lauteur le souhaite, par la suite...] La Conférence: ____Très très schématiquement, le cinéma expérimental, cest une autre manière daborder la pratique du cinéma et cest peut-être avant tout envisager le cinéma comme si cela pouvait être un art, mais un art personnel, un art qui aurait aussi la particularité de questionner, au travers de ses outils, ce quest le cinéma... (2:42) Pour moi, le cinéma expérimental, cest une pratique des arts plastiques, je suis un artiste qui fait des films et je ne minscris pas forcément dans le champ du cinéma, mais plus dans le champ des arts. (3:04) Une fois que jai dit ça, je ne vous ai rien dit sur ce quest le cinéma expérimental, parce que je nai pas de définition à vous proposer réellement de ce que cest, dans la mesure où chaque artiste, chaque génération dartistes va proposer par ses travaux, par la manière dont vont être agencées la production, les oeuvres ou les diffusions, de construire et de manifester de nouveau un champ, une définition du cinéma expérimental. ____Je vais faire un panorama un peu narcissique, pour essayer de vous indiquer comment à partir de moi, je vais vous faire partager ce qui me passionne. Pour moi, faire des films, ça ne pouvait pas être que faire des films, faire juste un film. Il me semblait important et je crois que cest toujours important de pouvoir penser que la pratique artistique ne consiste pas simplement à la production doeuvres, mais autant en la production de manifestations et de réseaux de diffusion. (9:20) Le cinéma expérimental comme la danse contemporaine et un certain type de musique contemporaine sont des pratiques qui doivent créer les lieux de leur condition dexistence (4:50). Il sagit de créer à la fois les oeuvres et les conditions pour quelles soient appréhendées, cela signifie créer des espaces, des dynamiques, des échanges ou des réseaux afin que ces oeuvres circulent... Dans les années 80, créer ces conditions a consisté, pour moi, à créer une structure qui sappelle Light Cone et un lieu qui sappelle Scratch Projection, dans lequel on montre et on diffuse des films. Faire des films, cétait aussi envisager que la pratique du cinéma ne se limite pas à cette pratique que vous pouvez consommer quand vous allez au cinéma: vous entrez dans la salle après avoir payé votre ticket, vous vous installez confortablement, puis il y a un film qui passe toutes les deux heures et puis la chose est faite. Vous avez eu une consommation classique du film et pour moi, le cinéma ne mattirait pas dans ce format-là. ____Travailler dans le champ de limprovisation Ce qui mattirait par contre, cétait peut-être éventuellement de minterroger sur les relations que la composition cinématographique pouvait entretenir avec la composition musicale. Et est-ce quil était possible denvisager de faire un film comme lon fait une musique. Dès que vous pensez faire un film comme on fait une musique, se pose la question de savoir si vous allez vous situer dans le domaine de limprovisation ou dans le domaine de lécrit, de la partition. Est-ce quil va y avoir quelque chose qui va préfigurer ce que vous allez faire ou est-ce que vous allez travailler sur limprovisation. Si vous travaillez dans le champ de limprovisation, sagit-il dune improvisation, comme le travail datelier que font les danseurs avec des exercices, et donc de se créer une sorte de substrat à partir duquel on peut improviser et déterminer des choses, ou sagit-il de faire véritablement quelque chose comme un happening ouvert. Et si lon a une partition, sagira-t-il dune simple exécution ou non? (7:50) Tout de suite se posaient pour moi des questions assez intenses sur ce que pouvait être le cinéma, et comment il pouvait se manifester automatiquement par rapport aux autres pratiques artistiques (8:09): à savoir, à partir du moment où vous pensez que cest du champ de limprovisation, est-ce que ça va se limiter au moment du tournage ou est-ce que ça va être aussi incorporé au moment de la diffusion? Où se situe le seuil de limprovisation, à quelle étape? (8:24) ____Lorsquun musicien classique joue une partition, je pourrais dire quil fait une transcription, quil donne une interprétation. À ce moment-là, on pourrait dire que limprovisation se situe au moment de lexécution. Lexécution serait le moment de la diffusion (8:43) pour le cinéma. Si vous pensez que le cinéma relève de lart vivant et non pas de lart enregistré, si vous pensez que lenregistrement sur une pellicule, cest quelque chose qui nest pas très vivant et que vous voulez manifester le cinéma comme un art vivant, dans ce cas-là, vous allez produire quelque chose qui va remettre en cause ce que lon entend par cinéma (9:05). Vous naurez plus à faire à une projection standardisée dune heure et demie, où tout événement surprenant serait la manifestation dune malformation, ou dun écart ou dun impair dans la projection (9:20). Je crois que les seules fois ou lon se manifeste au cinéma, cest lorsque le film a été lancé alors que le projectionniste na même pas pris le temps de faire le point ou de vérifier que les perforations étaient bien dans les dents du projecteurs, et quau bout de cinq minutes quand lun de vous aura éventuellement trouvé la cabine de projection, vous aurez assisté au déplacement et au recadrage. Ce sont à peu près les seules manifestations dun intempestif que vous avez dans le cinéma traditionnel, ou alors le film peut brûler ou se déchirer. ____Le cinéma comme un art musical de la combinatoire Mais si vous voulez travailler à ce niveau-là du cinéma, se pose la question: quest-ce que vous allez bien pouvoir faire avec? (10:12) Ce sont ces zones qui mattiraient étrangement, parce quelles relevaient de ce que jappelle le musical, du musical à un autre point de vue. Donc jai essayé denvisager le cinéma comme un art qui était avant tout un art musical (10:31), mais à tous les niveaux possibles. Si cest un art musical, cela signifie que cest avant tout un art de la combinatoire. La combinatoire, dans ce cas-là, fait référence aux moyens, aux outils (dont lordinateur), que vous utilisez quotidiennement en arts. Cest la possibilité de permutations, de variations mais aussi la possibilité dutiliser vos instruments comme des sortes darchives à partir desquels vous allez piocher un certain nombre déléments. La pratique de certains cinéastes expérimentaux (11:10) consistera à ne faire que du recyclage déléments trouvés à droite et à gauche, ce quon appelle le cinéma de Found Footage. Pour dautres, cette combinaison des éléments leur permettra de faire quelques propositions un peu plus hardies qui auront à voir autant avec des questions visuelles dans la composition de limage que des questions de position ou de localisation dimages (11:42). ____Les localisations dimages (11:55) sont un autre versant qui mintéressait dans la mesure où pour moi le cinéma nétant pas quelque chose qui est spécifiquement dans une salle de cinéma, se posait la question, comme pour nimporte quel artiste, de savoir la position de laccrochage (12:18). Quest-ce que ça veut dire mettre une image dans lespace, sur un mur, ou pourquoi mettrait-on toujours une image sur un mur. Pourquoi pas au milieu de lespace, pourquoi pas en haut, pourquoi limage ne serait-elle pas dans et pas sur (12:30). Ce sont des questions quon devrait se poser quand on fait des films et quelque soit le type dimage, de la même manière que se pose la question de la composition interne à limage. Eisenstein faisait ses cadrages de telle manière que les lignes de force de limage fassent toujours un triangle en sorte quà la projection, si vous navez pas la manifestation de ce triangle, vous perdez la moitié du film. Or, à la télé, limage est coupée en haut et en bas et sur les copies restaurées, pour que vous voyez les sous-titres, on décale le faisceau de sorte que vous perdez le haut de limage. Toutes choses allant à lencontre de la pensée du cinéaste. ____La spatialisation de limage. Dun côté je voulais faire de la musique (13:35), de lautre je voulais faire de la spatialisation de limage. Ce qui ma donné tout de suite envie de travailler le rapport, jai parlé de combinatoire, denvisager le rapport quil y a non seulement une image après lautre, mais aussi une image à côté dune autre (14:14). Ce qui ne peut impliquer que de faire appel à des multi-écrans, ce quon appelle schématiquement du Cinéma élargi (expanded film). Cela permet de penser ou denvisager des rapports qui sont assez intéressants dans la mesure où ceux-ci peuvent être comme les deux mains pour un pianiste qui joue deux types de notes mises en relation, ou tout simplement ce peut être deux mouvements épars qui vont se disloquer et dont les images vont se balader dans lespace. Vous allez imaginer alors une sorte de chorégraphie. Cest le travail que jai pu faire dans les années 80 qui posait des questions sur ce quétait le cinéma par rapport à la vidéo, par rapport aux autres arts plastiques et pourquoi le cinéma se posait encore ce type de questions (15:17). ____Quelque chose à voir avec le politique. Lune des choses qui est très étrange, cest que les cinéastes expérimentaux dans le monde des arts plastiques, semblent être des objets un peu préhistoriques qui se posent encore des questions comme quest-ce que cest quune image? Quest-ce quon peut faire avec une image quand elle précède ou quand elle est suivie ou quand elle est à côté dune autre image. Quest-ce que la série? Quest-ce que le rapport dune image aux autres, dimages dans lespace, de cet espace par rapport aux images? Ce sont des questions encore secondaires aujourdhui, mais qui nourrissent véritablement un certain nombre de cinéastes. Ces questions mont amené automatiquement à me poser dautres questions qui avaient à voir avec le politique, parce quau vu de la localisation et de la spatialisation dune image, je ne peux quessayer de déterminer ce quelle peut signifier et pourquoi elle peut signifier quelque chose. Progressivement, jai essayé de convoquer tout ce qui mintéressait dans ma pratique artistique et de faire des films mais qui nétaient plus nécessairement des films: ça pouvait être des vidéos, des travaux sur ordinateur.
|