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FRAGILE

FRAGILE

Par: Paula Maldonado

Ce projet a proposé d’intervenir la place Pompidou avec le plan d’une maison à l’échelle du corps humain dessiné avec du ruban marqué avec le mot « fragile ». Une maison qui nous parlait du lien conflictuelle qu’il y a entre l’espace public et l’espace privé et la façon dont on peut les apercevoir et expérimenter en tant que piétons, en tant que citadins, en tant que créateurs ou en tant qu’êtres humains. L’intention était de faire une action collective autour d’un sujet qui nous touchait à tous. Un sujet que vaux la peine réfléchir et d’en discuter, et à la fois une image capable d’intriguer les visiteurs et les piétons. Une image qui pouvait devenir un lieu d’interaction avec les gens qui se promènent sur place.

L’absence de limite ou l’ambiguïté entre ce qu’on appelle public et privé c’est un sujet qui apparaît souvent quand on réfléchit sur la liberté de déplacement. La liberté de mouvement, y compris la liberté d’action et de parole, est efficacement contrôlée dans une société où l’intérêt privé (on pourrait dire économique) donne les règles d’agencement dans l’espace et la place publique. Les règles et lois qui contrôlent la mobilité, alors, sont accompagnées pour systèmes complexes qui déterminent les lieux que chaque un peut ou ne peut pas occuper dans le territoire et la société. Dans ce sens l’intervention voulait, aussi, inciter les participants à un acte précis de désobéissance civil. Elle cherchait à confronter les règles du lieu, à jouer avec les possibilités de l’espace et à contredire la perspective institutionnelle qui a donné a cette place le statut de voie privée.

quartier place2

Il est important noter que le Centre National d’Art et de Culture Georges Pompidou a été construit dans l’espace qui occupait un vieux quartier déclaré îlot insalubre à partir des années 30, détruit, abandonnée et transformée postérieurement en stationnement. Il faisait partie, en principe, d’un projet qui voulait récupérer cet espace central pour la ville et qui se projetait comme une ouverture de l’art moderne et contemporain au public. En fait, selon l’histoire racontée dans son site web, le projet architectural du centre a été choisi en partie à cause de la connexion qu’il proposait entre le bâtiment et le mouvement de la ville a travers la place. Cette structure, heureusement, est très efficace et n’est pas facilement contrôlable, ce qui a fait ce lieu ambigu et intéressant.

Depuis un point de vue historique et général la place c’est le lieu par excellence de la rencontre et donne une espace physique à l’sphère publique. Cependant, ils ont été transformés de plus en plus en espaces de passage et exhibition du pouvoir, et ont perdu petit à petit son connotation de centre de réunion, échanges et discussion, sauf quand ils sont occupées pour manifestants qui en tout cas sont très vite dispersées ou contrôlés. Le cas de la place du centre Pompidou, dans ce contexte, est très particulier car le control et mesure qu’on fait de ce lieu est aussi une régulation de l’espace symbolique de l’art et de la culture. Curieusement, mais non gratuitement, la place Pompidou sert souvent comme « toit » aux SDF.

Voici les premières brouillons de la maison :

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« La sphère publique nous joint et cependant empêche qu’on tombe un sur l’autre. Ce qui fait si difficile de supporter la société de masses ne sont pas le nombre de personnes, mais le fait que le monde a perdu entre celles-ci son pouvoir pour les grouper, pour les rattacher et pour les séparer»

« Il est décisif que, dans tous les niveaux, la société a exclut la possibilité d’action. Dans son lieu, la société attend de chacun certaine forme de conduite, au moyen de l’imposition de normes variées et innombrables, tous les quels tendent a régulariser à ses membres, à les faire agir, à exclure l’action spontanée »

« Il semble être dans la nature de la relation entre la sphère publique et la sphère privée que la disparition de la première est accompagnée par la menace de liquidation de la deuxième »

Hannah Arendt

Captura de pantalla 2013-03-29 a la(s) 16.38.42 copia     Pompidou, maison

La fragilité de l’sphère public, qui dépend aussi de la fragilité de l’action, s’oppose au control du comportement et nous fait réfléchir sur la signification de ce qui veut dire habiter.  De là l’intention d’insister sur l’appropriation de l’espace publique et l’expérience de l’action consciente, car habiter une espace est loin de avoir une propriété et obéir loin de agir.

« La véritable crise de l’habitation réside en ceci que les mortels en sont toujours à chercher l’être de l’habitation et qu’il leur faut d’abord apprendre à habiter. »

Heidegger

plan maison        Captura de pantalla 2013-05-04 a la(s) 21.04.37

L’un des éléments le plus importants de cette intervention était l’organisation du projet et le travail d’équipe. Je savais depuis le premier moment non seulement que j’avais besoin de l’aide des autres mais que les autres occupaient un lieu fondamental. De plusieurs manières j’ai eu l’aide, dans la conception du projet, dans la planification et la réalisation de la intervention; cependant le plus enrichissant était l’opportunité de dialoguer, de penser, d’imaginer, de faire avec les autres.        En cherchant à créer un groupe de travail j’ai fait une invitation personnel par mail et un groupe de Facebook. Bien qu’on n’ait pas fait une réunion du groupe avant l’intervention, j’ai parlé personnellement avec chaque un des participants ; j’ai essayé de les impliquer vraiment et de commencer une discussion à propos des sujets en jeu.

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On s’est retrouvés le premier mai à côté de la place Pompidou. La première surprise était que le musée n’ouvre pas ses ports le jour du travail, et par conséquence il serait impossible de faire une vidéo de l’intervention depuis les escaliers. En plus, on n’aurait pas l’ambiance habituelle de la place, et on n’aurait pas les spectateurs imaginés. Par contre, on avait un situation très particulière, tous les vendeurs et travailleurs de la rue, les clowns, les magiciens, les artisans, les musiciens etc. avaient été prévenus par les autorités de se maintenir dehors de la place. Alors,  personne n’y restait long temps, même les touristes restaient dans la limite pour regarder l’édifice et prendre des photos. Seulement quelques piétons la traversaient.

Voici le video de l’expérience et quelques photos:

 

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Il y aurait plusieurs choses a commenter sur ce qu’on voit dans le vidéo, mais je crois intéressant surtout remarquer qu’il y a eu pendant l’action deux moments cruciaux qu’on peut associer au conflit et à la discussion, aussi à la fragilité de l’action et à la complexité du lien entre publique et privée. Le première moment a été l’arrivé des gardiens, la discussion avec eux, le postérieur dialogue qu’on a eu et la décision de continuer malgré l’interdiction et le risque de se faire punir. Le deuxième moment a été la discussion qu’on a eu sur ce qu’on était en train de faire pendant qu’on mangeait ensemble dans la maison ; conversation qui a fini pour nous pousser a continuer l’intervention avec une action inattendue : on a décidé de ramasser les objets et déchets qu’on trouvait dans la place et les rues qui l’entourent et on les a réorganisé a la maison. On a expérimenté, presque sans nous rendre compte, a la fois la fragilité de ce qui dépend de l’hasard, mais la force de ce qu’on ne peut pas mètre en arrière. Aussi, on s’est mis en situation, on a confronté le lieu, le vide, l’interdiction… et on a pris le risque de l’habiter.

Présenté par: Paula Maldonado

 

Bibliographie

ARENDT, Hannah. La condition de l’homme moderne. Paris: Agora, 1983.

HEIDEGGER, Martin. Essais et conférences. « Batîr, habiter, penser ». Paris: Gallimard, 1951.

PAQUOT, Thierry. « Le public est dans la rue » dans: PERRATON, Charles. Derive de l’espace publique a l’ère du divertissement. Presses de l’Université du Quebec.