Etienne Pottier à l’Amour

Durant 3 jours de novembre, Etienne Pottier accrochait ses dessins sur les murs de l’Amour. L’occasion dans un premier temps, de visiter cet espace créatif qui prend la forme d’un squat et qui met en avant la partie alternative de la création contemporaine, mais surtout, de découvrir le travail de ce dessinateur issu de l’Ecole Nationale des Arts décoratifs de Paris.

À l’entrée, le premier dessin présenté est une Origine du monde revisitée. Nous sommes en 2015, l’origine du monde est épilée, et le trait est sombre. L’œuvre de Courbet a perdu sa dimension mystique et s’inscrit brutalement dans notre société contemporaine. Le mythe de la matrice originelle a laissé place à un vagin, ni plus ni moins.

Etienne Pottier, Sans-titre, 2015. Graphite sur papier, 24 x 30 cm.

Etienne Pottier, Sans-titre, 2015. Graphite sur papier, 24 x 30 cm.

Etienne Pottier scrute les symboles qui se situent dans l’histoire de l’art et les grands thèmes classiques : la mort, le sexe, la guerre, les vanités.

En poursuivant la visite, on découvre la passion de l’artiste pour les motos. Ses motos triomphantes qui défient la mort et en sont le symbole. En gravant les contours d’une Suzuki sur un sol d’os et de fleurs, Etienne Pottier nous parle de la culture biker, celle qui frôle la mort, inébranlable. Il nous rappelle le Prince noir, ce mystérieux motard qui, un matin de septembre 1989, enfourcha sa moto pour faire le tour le plus rapide du périphérique parisien, en 11 minutes 04.

Etienne Pottier, Sans-titre, 2015. Graphite sur papier, 24 x 30 cm.

Etienne Pottier, Sans-titre, 2015. Graphite sur papier, 24 x 30 cm.

Derrière les motos, on remarque que les chiens ont une importance toute particulière dans le travail de l’artiste. Les dobermans aux oreilles taillés viennent ponctuer l’exposition. Le traitement du dessin révèle leur vulnérabilité, ils ne sont plus les chiens combattants que nous connaissons, mais se font l’emblème de la différence et de la bonté.

Mais ce qui attire le regard dans cette exposition, c’est cette immense fresque sur papier, accrochée à l’arraché sur le mur. Une scène apocalyptique d’une guerre non définie devient alors la pièce maîtresse où les nuages de fumée des armes à feu rythment les mouvements féroces des hommes et des animaux. Ici aussi, le trait est dense et ténébreux.

Vue d'exposition à l'Amour, 2015, © Etienne Pottier

Vue d’exposition à l’Amour, 2015, © Etienne Pottier

Il y a quelque chose d’adolescent dans le travail de Pottier, de sa façon de dessiner une roue de moto pas toujours ronde, à la place qu’occupe le dessin, un objet à la fois sacré et obsolète, sur une feuille de papier millimétré. Il nous rappelle l’ennui de l’adolescence qui débouche sur une observation dystopique du monde. Puis il y a l’ambivalence avec un traitement d’image parfaitement maîtrisé et mature qui révèle au monde la part sombre des choses, où la vision de l’homme et de l’adolescent se confondent finalement.

Etienne Pottier, Sans-titre, 2015. Gravure sur papier, 26,5 x 34 cm.

Etienne Pottier, Sans-titre, 2015. Gravure sur papier, 26,5 x 34 cm.

Marie Bonhomme

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