« Opportunity knocks only once » – Biennale JCE Le Beffroi

Giovanni Longo, Distanza zero, "Fragile Skeletons" series, 2015, Exposition "Opportunity Knocks Only Once" - Le Beffroi  ©PierreTarnawski

Giovanni Longo, Distanza zero, « Fragile Skeletons » series, 2015, Exposition « Opportunity Knocks Only Once » – Le Beffroi ©PierreTarnawski

La biennale d’art contemporain Jeune Création Européenne (JCE) est comme tous les deux ans hébergée à Montrouge au Beffroi. Elle y réunit depuis 2000 une diversité culturelle à travers une jeunesse artistique éparpillée aux quatre coins de l’Europe, qui cette année rassemble pendant quelques jours 7 pays, l’équivalent de 56 artistes. La JCE ouvre ses portes du 15 octobre au 3 novembre 2015 pour une rétrospective itinérante : 7 pays, 7989 km de distance de parcours, 730 jours d’exposition entre la France, le Danemark, la Pologne, la Lettonie, l’Italie, l’Espagne et le Portugal. Cette expérience unique nous est présentée par Andrea Ponsini, qui s’engage cette année encore comme Commissaire général d’exposition.

Oskars Pavlovskis, Untitled, 2014, ©PierreTarnawski

Oskars Pavlovskis, Untitled, 2014, ©PierreTarnawski

Ce salon aux grandes possibilités scénographiques – par les 7 pays représentés et la taille du lieu – nous offre une visite plutôt simple, bien dessinée, mais sans atout majeur. On pourrait s’attendre à une confrontation entre pays, un écho entre les œuvres ou un échange interculturel plus poussé qu’un simple aménagement d’œuvres posées les unes à côté des autres. On y retrouve des relations peu, voir non exploitées, malgré le potentiel indéniable du concept originel. L’installation et la disposition du lieu sont quelques fois assez gauches : des cartels pas forcément évidents à trouver ou encore la création d’une partie lecture d’informations qui n’est pas très pertinente dans cette exposition et trouverait d’avantage sa place à l’extérieur de la salle. De plus, la mise en lumière ne semble pas travaillée, et le plan distribué dès l’entrée se révèle inexact. On peut d’ailleurs entendre en fond sonore la « bande-annonce » de la biennale – provenant de ce même espace – en boucle, ce qui casse l’atmosphère de la visite, voir peut vraiment déranger les moins patients d’entre nous. Le côté professionnel que l’on attendrait d’un évènement comme celui-ci n’est pas au rendez-vous.

Ignasi Prat Altimira, Inventory of the Official Political Portrait, 2013-2015, ©PierreTarnawski

Ignasi Prat Altimira, Inventory of the Official Political Portrait, 2013-2015, ©PierreTarnawski

De plus, on remarque lors de notre visite une certaine inégalité entre les pays au niveau de la production artistique : certains passent presque inaperçu, sont beaucoup plus effacés dans leur présence comme le Portugal qui ne présente qu’une installation plutôt discrète autour d’un rassemblement de tableaux, comparé à d’autres pays qui s’installent plus dans leurs espaces respectifs et sont plus diversifiés artistiquement dans les médias employés, dans les œuvres présentées : vidéos sonores, sculptures, œuvres qui amènent une certaine interactivité, etc.

Tatiana Wolska, Untitled, 2015,  ©PierreTarnawski

Tatiana Wolska, Untitled, 2015, ©PierreTarnawski

 

Dans les œuvres plus précisément, l’une d’entre elles sort du lot. L’œuvre la plus intéressante et marquante reste celle de Tatiana Wolska, Untitled de 2015 (section France), car cette imposante sculpture de plastique, comparée aux autres œuvres de l’exposition, se situe au milieu du chemin de la visite, elle nous oblige à la remarquer, à la distinguer par sa taille, sa position, mais aussi par sa couleur vive tirant sur le rouge. Cette masse à première vue faite d’accumulations de plastique est ici non pas dans le concept d’addition, mais de soustraction de la matière. En effet, l’artiste utilise un tube circulaire chauffant pour faire fondre le matériau et ainsi créer une répétition de motifs circulaires les uns à la suite des autres pour finir par égaliser la quantité de plein et de vide.

Tania Brassesco et Lazlo Passi Norberto, Under the Surface, 2014, ©PierreTarnawski

Tania Brassesco et Lazlo Passi Norberto, Under the Surface, 2014, ©PierreTarnawski

Christine Overvad Hansen, Stonemachine, 2011, ©PierreTarnawski

Christine Overvad Hansen, Stonemachine, 2011, ©PierreTarnawski

Néanmoins, durant ce « road trip » européen on remarque qu’il n’y a pas de sujet général. La diversité artistique nous offre une multitude d’aspects et d’émotions : on peut percevoir une certaine solitude, une mélancolie à travers l’œuvre de Tania Brassesco et Lazlo Passi Norberto, Under the Surface (2014 – section Italie) qui est un tableau plutôt intriguant puisque l’on peut s’interroger sur le processus de création de l’œuvre : Est-ce une photographie authentique ou de la retouche par ordinateur ; ou encore dans la section Danemark, on remarque une certaine vitalité, une dynamique plus poussée tout aussi bien figurée avec des œuvres ne faisant que suggérer le mouvement, que littérale avec l’œuvre Stonemachine de Christine Overvad Hansen (2011), constituée d’un moteur qui fait descendre puis remonter une roche répétitivement, allégorie d’une industrialisation de l’homme sur la nature, c’est à dire de l’avancement technologique de l’homme et des ravages entraînés sur son environnement, représentant un réel dynamisme mécanique et temporel autour de l’œuvre.

Finalement, cette biennale qui partait sur une idée plutôt ingénieuse, au cœur de l’actualité d’aujourd’hui avec ce côté de voyage sans frontière dans une Europe en crise, ne réussit pas à réaliser son but premier, de faire connaître des artistes émergeant et de les amener vers une  notoriété supérieure au sein de ce milieu artistique.

 

Pour de plus amples informations :
http://jceforum.eu/index.php/fr/

Pierre Tarnawski