Musée d’Art Moderne de la ville de Paris, du 10 Octobre 2014 au 1 Février 2015
Par Raphaëlle Peria
En haut des marches, l’univers de David Altmejd nous happe. Les commissaires invitent à pénétrer dans son intérieur tant physique que métaphorique, son laboratoire où tout n’est que mouvement, échange et transit. « Flux » parle du fonctionnement du corps humain, mais aussi du développement de nos façons de penser et de concevoir le monde. C’est une grande machine qui bien qu’inamovible semble nous entrainer sans cesse vers l’avant. Nous suivons alors une boucle interminable parfaitement desservie par la mise en espace des œuvres. Le Musée d’Art Moderne serait-il devenu un musée du futur ? Dans la première salle, des Michel-Ange du troisième millénaire surplombent les spectateurs épars, colosses sortis tout droit d’un film de science-fiction. Composés d’un mélange d’époxy, d’argile et de miroirs ; recouvert de faux cheveux et incrustés de pierres semi-précieuses ou couverts de peinture et d’animaux taxidermisés, ils se dressent sur leur socle en béton, formant une grande allée dans laquelle le spectateur évolue. Giant par exemple semble surtout loup-garou, figure récurrente dans le travail de David Altmejd, croisement entre l’homme et la bête, représentation suprême pour lui de la métamorphose. Cette sculpture de deux mètres de haut nous montre un homme, un géant, aux allures animales dont le corps recouvert de peinture dégoulinante et de poils drus abrite une famille d’écureuil. Un grand miroir par endroit fracturé les reflète, nous plongeant dans une galerie de l’évolution où le monstre devient petit à petit Homme. Poses classiques et matériaux hétérogènes dialoguent ensemble, peut-être pour nous montrer que l’Art Contemporain et l’Art classique ne peuvent pas être en rupture totale.
Après la galerie des sculptures, le spectateur découvre une série d’installations, constellations d’objets minutieusement agencés dans des boites de plexiglas révélant l’intérêt de David Altmejd pour la complexité des sciences naturelles et la biologie. The Flux and The Puddle, réalisées spécialement pour l’exposition emplie l’entièreté d’une salle dont les murs nous perdent dans un espace infini de miroirs. Apothéose de l’exposition, l’œuvre pourrait se voir comme une synthèse du travail de David Altmejd. On y retrouve des éléments issus de chacun de ses autres travaux, enchevêtrés pour former un système complexe, une abondance de flux qui emporte le spectateur dans la matière et l’ouvre à ses rêveries.