Simon Leibovitz Grezeszczak aka Orsten Groom est un jeune peintre et vidéaste français. Après sa participation au salon Jeune Création en 2014, il présente actuellement son solo show, intitulé FELDGRAU, à la Galerie du Crous de Paris. Ce terme signifie littéralement « GRIS VERDÂTRE » en allemand. L’artiste a choisi ce titre d’exposition et notamment le mot « feld » pour ses diverses significations. Ce dernier désigne la couleur grise mais également le terme « champ », champ pictural, champ coloré mais aussi champ de guerre, champ de ruine. Un titre qui apparaît tout à fait approprié à ce que l’artiste nous donne à voir : une oscillation entre couleurs éclatantes, lumineuse, pures (sorties du tube), et éléments figurés, matériaux ayant attrait au macabre, à l’ignoble, au rebus.
Il semble que l’œuvre d’Osten ne puisse être réellement appréciée, comprise dans tous ses enjeux, qu’en ayant connaissance d’éléments biographiques de son auteur. En 2002, Simon a un accident cérébral. Il tombe dans le coma. A son réveil, il est amnésique. C’est là qu’on lui apprend qu’il est étudiant aux Beaux arts. Il se rend dans son atelier et commence à presser un tube de peinture, puis un second… Il explique : « Dès le départ j’ai eu cette obsession, cette présence constante de la « boue ». La boue qui emporte tout, partout, ambiante. ». Passionné par l’art médiéval et byzantin, la peinture d’icône, la peinture flamande ou encore par Mondrian, Orsten Groom parle au sujet de sa peinture de « gloire crapoteuse ». Un jeu en effet entre le sacré et l’infâme, qui place le spectateur entre le dégoût, voire l’horreur et l’attraction, le plaisir et même l’amusement.
Une fragilité brutale qui prend toute sa force dans cette exposition. Aidé de ses paires Philippe Cognée et Vincent Corpet, l’artiste semble avoir pensé la scénographie de ses œuvres comme un réel parcours visuel à travers sa peinture. Les différentes salles sont baignées plus ou moins légèrement dans la pénombre, présentant des œuvres de formats et de dimensions différentes, éclairées de manière individuelle. L’une des originalités de l’accrochage consiste à exposer l’une des peintures au bord d’un mur. Cela permet, en se plaçant d’un certain point de vue, de créer une continuité avec des œuvres placées dans la salle précédente. Ainsi, Orsten parvient à créer un réel univers pictural dans l’ensemble de l’espace d’exposition.
Finalement, il est plaisant de découvrir ces œuvres dans différentes atmosphères crées en jouant avec la luminosité et de pouvoir apprécier la pratique de sculpteur de l’artiste.
On se sent également dans l’antre d’Orsten avec cette effluve de hareng moisi qui imprègne légèrement tout l’espace d’exposition.
Cependant, l’artiste étant aussi vidéaste, il est dommage de n’avoir pu apprécier aucune de ses œuvres vidéo. D’autant que l’espace d’exposition le permettait.
Léna Larrasquet