Oriane Amghar – AKA Gwendolina March

Oriane Amghar est une performeuse aux multiples prestances. Tout comme peut l’être Gwendolina March, le personnage, le costume que revêt l’artiste durant ses représentations.

Gwendolina est née dans l’esprit de l’artiste un beau mois de Mars, d’où son nom de famille. D’où vient-elle ? Qui est-elle ? Personne ne le sait véritablement hormis peut-être Oriane Amghar elle-même. Car elle ne serait en quelque sorte qu’une version amplifiée, détournée, magnifiée ou même rabaissée de sa créatrice.

Avec un goût prononcé pour l’oralité, une prédisposition à la rhétorique et une précision du langage, Gwendolina a le pouvoir de conquérir son auditoire et les foules. Notre artiste la décrit comme une fille sans-gêne, insolente, qui ment sans scrupules et qui aime ça. Tout comme Oriane qui assiste à ce « show » un peu comme une simple spectatrice. Il est alors possible de réinventer le monde, l’Histoire, sa propre histoire en s’inventant des personnages et des situations continuellement renouvelables. Pourtant, il est difficile de tomber dans son piège tant il est grossier et emprunt d’ironie. Qu’importe, puisque cette technique arrive à créer un échange, une interaction, du discours et une certaine complicité entre elle et son public.

Gwendolina est donc par certains côtés le double d’Oriane, son synonyme. Elles créent et montent sur scène ensemble. Elles performent ensemble. Gwendolina est le moyen, l’excuse donnée à Oriane pour exprimer l’ambiguïté de son être. Pourtant, il arrive que cette seconde peau soit de trop. Alors il convient de l’enlever, la retirer comme un masque de silicone afin de révéler son vrai visage. Lorsque Gwendolina n’a plus rien à nous apprendre et plus rien à nous dire, Oriane réapparaît fragile, sensible et tremblante. Elle nous parle alors de regret, d’elle et donc de nous-mêmes.

Gwendolina porte elle aussi un masque et celui-ci est linguistique. Tout n’est que fiction, oralité et réalité entremêlées. On assiste alors une à manipulation et un art du détournement, qui ne seraient qu’une technique d’investigation du réel. Il y a là en somme quelque chose de très figuratif. L’artiste privilégie le risque de l’invention, la provocation, l’ambiguïté de la situation à son évidence, l’énigme au constat et enfin les rencontres narratives à la sécheresse de l’inventaire.

La fiction est ici perçue comme une plaisanterie qui explore avec éclectisme les traces d’une hypothétique réalité.

Un jour néanmoins, Gwendolina devra mourir. Encore un fantasme de l’artiste. En attendant ce jour, Gwendolina n’a pas fini de nous surprendre. Et Oriane Amghar non plus.

Surprenantes, déroutantes ou amusantes, les performances de ces deux femmes nous emportent dans un tressage de la réalité et de la fiction. Et de par la très grande proximité de l’artiste, on ne peut qu’être happé par cette spectaculaire fantasmagorie du rôle et de l’être. Oscar Wilde a d’ailleurs dit un jour « J’adore être comédien, c’est tellement plus réel que la vie ».

Marcy Petit

One thought on “Oriane Amghar – AKA Gwendolina March

  1. Bravo, c’est ce qui s’appelle avoir de l’intuition [pour ceux qui n’auraient pas suivi Oriane Amghar vient de recevoir le prix Jeune Création-SYMEV]

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