Dialogue entre solides de Paola MENDOZA OSORIO

CollagedesArchives · Paola Mendoza- Dialogue Entre Solides

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Cette pièce sonore est le résultat d’une belle découverte. Après une promenade dans les rues de Montparnasse, le Jardin Atlantique contenait en lui plusieurs univers sonores, les bruits des trains dans la gare, le chant des oiseaux, des inconnus qui mâchouillaient le sandwich Monoprix et après cette couche de sons sans décibels élevés, tout en arrière-plan je percevais des cris, vraiment en arrière-plan à gauche, bien ma gauche, entrant par les escaliers ou l’ascenseur de l’avenue du Maine. J’ai entendu des cris courts mais puissants, mais ces sons aigus émis de manière brusque, n’étaient pas des contenants de colère, ou d’hystérie, que j’avais l’habitude d’entendre et donc d’identifier.  La base était plus profonde, il me semblait entendre l’importance d’un corps en mouvement résumée en deux secondes, et instantanément on entendait la collision d’un deuxième corps solide, à laquelle répondait un troisième corps. J’ai immédiatement couru pour le voir. Trois corps solides qui communiquent. Il était clair que je voyais quelque chose de différent de ce que j’entendais. J’ai vu deux hommes et une balle et j’ai entendu un dialogue intense d’exclamations, provoquant une mécanique de frappe, de vitesse, de direction et de puissance à un corps vert, qui a été répondu. J’ai été fasciné par cet événement, le jeu des cris stratégiques.

En poursuivant la visite de Montparnasse, mon attention a été attirée par l’activité sportive, par les regroupements. La Petanca, mais cette fois ce ne sont pas des cris que j’entendais, mais des conversations banales qui m’ont fait sourire, m’ont amusé, m’ont fait revivre une atmosphère familière. Le coup de la boule de pétanque semblait émulsionner le ton sensible de la blague, si vous la lanciez mal, vous seriez submergé par des onomatopées qui expriment la moquerie sur votre jeu minable.  Mais ce n’était pas du tout nuisible, c’était pour agacer le membre ou le partenaire d’une manière douce, c’était un signe de la bonne humeur qui dansait sur le terrain de jeu. C’était comme se lever le matin et voir les grands frères se lever du pied droit du lit et embêter le petit en signe de puissance et d’amour incompréhensible.

 

Le troisième jour, mon jour le plus court mais le plus long au même temps. A la Villa Savoye, le bâtiment ne me parlait pas, ou plutôt je ne lui parlais pas. Le silence remplissait l’espace et sa structure me faisait revoir à Le Corbusier dans l’Université nationale de Colombie, mais le souvenir ne transmettait pas beaucoup de sympathie à mon égard. Je ne voulais donc pas faire de grimaces, ni lui vexer, vexer au bâtiment bien sûr, parce que je ne pouvais pas communiquer directement avec sa forme, alors je suis sortie. Sortir a toujours été bon pour moi. Dans le jardin, j’ai entendu un ALLÉ ALLÉ JUSQ’A AU BOUT, NE DESALERE PAS, HOPLA QUATRE VING QUATORZE OK, BON ON CONTINUE. CARLA, CAMILLE, DARLINE, … J’étais un infiltré dans un cours de sport. J’étais toujours si paresseux à l’école pour faire du sport, que je faisais semblant d’être blessé, ou que je n’apportais pas dans mon sac à dos la bonne humeur vers l’enseignante Nancy, mon prof du sport. Moi, j’étais donc toujours au comité des applaudissements, écoutant aux escaliers de Jet « Are you gonna be my girl » ou de The Clash « London Calling » et applaudissant mes camarades de classe pour donner son âme au sport, lorsqu’il s’agissait de faire la course je n’étais pas présent. Au début, je ne voyais que des feuilles et des ombres, mais j’ai entendu la course de Darline qui était en fait la meilleure de la classe. J’ai entendu le son de la fatigue et de la frustration du garçon aux cheveux longs. Je pense qu’il était un ami de Darline parce qu’il l’appelait par son nom pour lui demander le temp marqué par le chronomètre de la prof.

Au quatrième jour, entre les coups de boule, le lancement d’une balle d’argent et l’épreuve physique des lycéens ; je me suis rendu compte que j’avais gagné quelque chose, le son m’est entré dans les yeux. J’ai pu voir à travers le son. J’étais une personne qui s’est donnée volontiers au visuel. Le son a été subordonné, toujours derrière le visuel. Mais il peut être aussi plastique que l’argile.

Soulignez que les sons onomatopéiques sont pour la plupart ancrés dans votre langue, votre culture, mais qu’ils sont aussi appris ou rejetés. Les mouvements du corps, les gestes, les sons de la bouche font partie du dialogue, ils communiquent. Et les activités telles que le travail, le sport et les loisirs sont une façon d’urbaniser l’espace. Et dans l’urbanisation de l’espace, il y a place pour d’autres manières de le construire. Cela soulève des questions sur la façon dont je me rapporte à cet espace, sur la façon dont l’autre fait des liens avec mon rapport el son rapport à lui, autrement dit le dialogue entre trois ou plus objets solides.

Paola Mendoza