Mona lisa, projet des Halles, son
accoustique stéréo, 1'41", 2009.
Les Halles, la rue du Louvre, écho d’un
temple de la culture dans un temple de la consommation.
Au-delà de l’opposition apparente entre la permanence de
l‘art et l’éphémère frivolité
des modes, n'y a-t-il pas des points communs entre ces deux lieux?
On y marche pendant des heures, on se perd dans leurs coins et recoins,
on y cherche des choses qu’on ne trouve pas forcément.
Les Halles, le Louvre, ce sont deux lieux de passage; deux accès
à d’autres mondes fantasmés et rêvés,
chorégraphiés comme des parcs d‘attraction. Passage
vers une culture universelle, un mode de vie idéalisé,
entouré du Beau, source de bien-être, n’est-ce pas
la même thématique qui travaille plus ou moins consciemment
les utilisateurs de ces deux lieux?
Et à l’heure où la promotion culturelle vend une
exposition comme on vend un blockbuster hollywoodien, la différence
entre ces deux mondes ne s’estompe-t-elle pas?
Dans les vitrines du Musée comme dans celles des boutiques, on
présente des objets et on essaye de les mettre en valeur pour
attirer, retenir le spectateur et si possible lui vendre quelque chose.
Un pull ou une reproduction, un livre à la Fnac ou un catalogue
au Louvre, la consommation n’a-t-elle pas tout englouti?
Quand l’art devient objet et l’objet marchandise, Mona
Lisa est-elle un produit?
Comment représenter ce croisement, ces similitudes, comment interroger
nos comportements dans de tels lieux?
L’inspiration me vient d’un film photo-roman des années
60, La Jetée de Chris Marker, comme lui jouer sur l’aspect
transitoire.
Je cherche à expérimenter, à utiliser les potentialités
de la stéréo. Deux canaux, droite et gauche, un choix
offert au cerveau de sélectionner le son qu’il veut écouter,
mais sans pouvoir se débarrasser de l’autre son. Un trouble,
une tentation constante qui perturbe la pensée logique, l’attire
vers le prochain produit.
La porte du Louvre est un lieu de transit pour les passagers des Halles
vers le Musée du Louvre, une incitation à une autre consommation.
Le plus grand trésor du Musée est la Joconde,
devenue symbole universel de la culture mais aussi objet fantasmé,
détourné, y compris à des fins commerciales.
Et comme pour ces marchandises qu’on a tant convoitées,
quand on la voit enfin, la voit-on elle?
N’est-ce pas plutôt l’image déformée
que nous avons fantasmée?
Et la confrontation au réel peut engendrer une déstabilisation
dont veut rendre compte la voix déformée de l’annonce
utilisée dans ma bande sonore.