Vidéo d’Art

 

 


Depuis l’année 2005, je filme des expositions artistiques à la demande de Madame Liliane Terrier, professeur dans le département Arts Plastiques, Paris VIII. Elle a l’idée de mettre des images temporelles en ligne, pour que celui qui n’a pas pu aller voir ces expositions puisse les consulter. Les expositions sont éphémères, les catalogues avec des photos ne peuvent qu’indiquer quelques aspects des œuvres. Il est difficile pour le lecteur de restituer les notions d’espace, de temps et d’ambiance que ressent un visiteur.


Ce travail est pour moi un exercice et aussi un défi. Une vidéo qui présente une exposition artistique doit être artistique aussi, sinon elle n’est pas à la hauteur pour l’introduire aux spectateurs. Elle doit aussi garder son objectivité pour ni l’embellir, ni l’enlaidir. Mais elle montre inévitablement comment la personne derrière le viseur la voit, l’interprète et la comprend, car elle est avant tout un visiteur et à travers son regard et son montage, on va appréhender cette exposition, puis l’apprécier ou ne pas l’aimer.


Ainsi on rencontre un dilemme entre l’objectivité et la subjectivité. Avec trop d’objectivité, celui qui filme devient un pur caméraman, son travail n’est plus une création, mais un simple témoignage ou une exécution technique qui enregistre un événement. En revanche, si on filme avec une grande subjectivité, la vidéo est plus proche d’une œuvre qui menace souvent l’importance de l’exposition et son artiste. Le sujet n’est plus cette exposition, mais l’opinion du vidéaste vis-à-vis des œuvres de cet artiste, ou sa création à partir de cette exposition.


Je pense qu’une bonne vidéo sur une exposition est celle qui suscite chez le spectateur l’envie de connaître plus d’œuvres de l’artiste et de voir ensuite une série de vidéos de ce genre. Bref, le vidéaste joue le médiateur entre l’artiste et le spectateur sans être anonyme. Il est à la fois journaliste qui donne des informations et critique qui exprime ses appréciations. Cela veut dire qu’il est l’œil du spectateur ou son délégué du monde de l’art. Et la vidéo est le meilleur support pour saisir l’instant éphémère d’une exposition. Son travail ressemble à celui d’un rapporteur dans la littérature. Il montre le contenu d’un sujet en profondeur en employant un ton sensuel et littéraire, mais détaché. Il décrit ce qu’il voit et traduit ce qu’il ressent devant un phénomène. Il doit avoir un regard aiguisé pour remarquer des choses cachées et une sensibilité extrême pour saisir des messages implicites.


Tout cela est lié à la réception du spectateur, mais pour un étudiant qui souhaite aussi devenir un jour, un artiste, il doit s’intéresser à l’amont de l'exposition : la conception d’une œuvre du côté de l’artiste. Ainsi filmer une exposition m’offre une occasion d’être plus près de l’artiste, de son idée et de sa création. Surtout lorsque l’on pose des questions à l’artiste, je peux voir comment il formule ses théories et leurs applications dans sa pratique. Peu importe quel est le thème de l’exposition ou de quel genre d’exposition il s’agit, par exemple une installation, une projection, des peintures ou des sculptures, j’en profite pour élargir ma vision et apprendre auprès des œuvres et auprès des artistes. Dans cette catégorie, vous trouverez les vidéos suivantes:

Baby love (avec texte)

Crackers

Hyun-Ah Hong

Kolkoz ( deux vidéos)

Yamatonatto


Dans la situation évoquée plus haut, je joue le rôle du médiateur direct entre le spectateur et les œuvres. Mais dans le cours de l’Atelier Mobile, je joue le rôle secondaire. Ce cours organisé par Monsieur Rui Alberto et Madame Liliane Terrier à Paris VIII, consiste de délocaliser les cours vers les espaces hétérotopiques du Musée d’art moderne et contemporain de Genève (Mamco), du Centre culturel suisse (CCS), de la Fondation Dapper, au fil de leurs expositions et de filmer les visites. Et pendant les visites des musées ou du centre culturel, nous avons un guide local qui nous présente les expositions et nous donne une clé d’accès à l’univers des artistes. En filmant les guides et les oeuvres, j’ai appris à mieux organiser le tournage et aussi le processus de montage, surtout quand la visite dure plus d’une heure, voire deux heures. J’ai confronté des exercices différents selon le moment où j’ai filmé les œuvres, c’est-à-dire avant ou après l’explication du guide. Ainsi, j’ai occasion de tester respectivement ma sensibilité devant une œuvre sans commentaire et ma mémoire sur l’oeuvre commentée et sur sa relation spatiale avec le guide au niveau de la prise de vue et de l’éventuel montage. Dans le cadre universitaire, le tournage comprenant beaucoup de restrictions est toujours imprévisible. Alors, la façon de filmer la visite devient obligatoirement spontanée et problématique. À chaque instant, j’hésite à savoir si je collerai au visage du guide ou suivrai le contenu de sa parole et intègrerai l’œuvre concernée dans l’image sur champ. D’une certaine manière, le résultat du filmage, fait penser à Zidane : un portrait du 21ème siècle, car c’est à travers les guides et leurs discours que nous voyons les portraits des artistes et leurs œuvres, beaucoup plus présentes que leur homologue, le ballon entrant dans le but. Grâce aux guides, j’apprends à apprécier différemment les œuvres des artistes. Dans cette catégorie, vous trouverez les vidéos suivantes:

Scène suisse

Musée Dapper

Artistes contemporains sénégalais


En conclusion, filmer des expositions fait partie de la conservation de la mémoire. Non seulement pour construire une médiathèque ainsi les gens peuvent les consulter plus tard, mais aussi pour enrichir la palette de ma création, c’est-à-dire les intégrer en moi et en disposer à mon gré, même au moment de la conception d’une œuvre
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