Baby love

 

Baby love, une exposition de Shu Lea Cheang, une artiste taïwanaise, a eu lieu au Palais de Tokyo à la fin de l’année 2005 et au début de 2006. Dans cette exposition, il y avait de grandes tasses dans lesquelles on pouvait s’installer et les faire rouler avec un volant dirigé du bout des doigts. Durant le déplacement, un bébé mannequin faisant office d’ordinateur avec une antenne, va capter des ondes dans l’air, et diffuser des musiques ou des chansons pré-téléchargées de l’Internet puis déposées dans le serveur central. Cette exposition a été organisée à côté du restaurant où on peut boire du café ou manger. En face au sous-sol, il y avait des lampions en papier blanc tournant autour d’un fil électrique à cause peut-être de la ventilation.


L’idée originelle consistant à agrandir la tasse à une échelle humaine est peut-être venue de l’ambiance délicate lorsque l’on boit un café ou un thé. Le changement d’échelle nous renvoie tout de suite à l’univers fantastique d’Alice au pays des merveilles de Lewis Carroll. L’idée de faire fonctionner le volant comme une souris d’ordinateur vise à rappeler du visiteur qu’il est en face d’une œuvre fragile et sensible comme un bébé. Ce n’est ni un jeu vidéo, ni une course d’autos tamponneuses dans une fête foraine. Il y a un médiateur entre l’œuvre et le visiteur, mais il est toujours trop occupé, car il doit expliquer à tout le monde comment faire fonctionner les machines. Le mode d’emploi a été indiqué sur les papiers ou sur les écrans accrochés au mur, mais les visiteurs n’ont pas l’habitude de le lire avant de s’approcher des tasses. Ainsi, la majorité des gens est montée dans la tasse avec leurs chaussures sans la permission du médiateur. Du coup, beaucoup de machines tombent en panne à cause de la brutalité des visiteurs.


J’ai filmé l’environnement de cette exposition, surtout par son côté poétique. Ce n’est pas seulement une installation qui a utilisé la haute technologie, elle est aussi très belle et très artistique. Quand on voit des tasses traverser le sol, on dirait dans un monde imaginaire. Chaque couple est dans son petit univers paisible, il vit son parcours et à son rythme.


J’ai montré aussi le problème rencontré à cause du manque d’études sur le public français parce que les Français, réputés être très romantiques, ont appréhendé l’œuvre comme s’ils conduisaient une voiture. Ils n’ont ni lu le mode d’emploi, ni écouté l’explication du médiateur. Ils réagissent avec violence, sans patience. De plus, à cause de l’épaisseur du béton du Palais de Tokyo, le signal informatique n’était pas suffisamment fort. Ainsi le concept de recevoir des ondes et de changer de musique, n’a pas bien marché. Dans l’interview, l’artiste a aussi parlé de ces problèmes imprévus.


Dans la conférence organisée par Paris VIII et l’École Nationale Supérieure des Arts Décoratifs, l’artiste n’a pas projeté le film que j’ai fait car elle n’avait pas eu le temps de le regarder auparavant. Je comprends très bien sa pensée, car mon point de vue peut être trop subjectif et le jugement que porte mon regard risque de la gêner, il faut donc être prudent.

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