Fabien Giraud et Raphaël Siboni, Last manoeuvres in the dark

À voir sans faute au Palais de Tokyo (et à étudier), l’installation de Fabien Giraud et Raphaël Siboni, Last manoeuvres in the dark.


Fabien Giraud et Raphaël Siboni, Last manoeuvres in the dark, 2008 (Photos et vidéo JLB).

Depuis 2007, Fabien Giraud et Raphaël Siboni travaillent ensemble sur divers projets artistiques tout en poursuivant simultanément leur pratique personnelle.

Ils partagent une attirance pour les pratiques communautaires, le mauvais goût et les différentes formes de sous-culture.

Fabien Giraud s’est fait remarquer notamment par son installation au Palais de Tokyo Sans titre (rodage), étrange vision d’une communauté à venir, constituée de trois mini-motos contrôlées par ordinateur .
Il a, par ailleurs, organisé un concert de musique punk hardcore afin de chorégraphier la foule.
Raphaël Siboni, quant à lui, a récemment signé un film intitulé Kant Tuning Club dans lequel un avatar de Deleuze côtoie des amateurs de ‘tuning’. On y trouve cette scène culte, hypnotique, d’un crash frontal entre deux voitures ‘tunées’, d’où émerge un Deleuze mi-rigolard mi-hébété pourvu d’ongles démesurément longs. Ce film questionne avec intelligence la figure du super héros d’aujourd’hui.

Mêlant airsoft, tuning, punk hardcore et Guinness des records, le travail de Fabien Giraud et Raphaël Siboni se situe à la limite entre art, culture pop et ‘entertainment’. Alliant le vernaculaire à la consommation de masse, le folk au pop, leur pratique tend à produire des objets et des événements complexes, souvent spectaculaires, qui questionnent la possibilité d’une subjectivité contemporaine.
Par des processus d’hybridation et le reparamétrage de pratiques issues de la sous-culture pop, Fabien Giraud et Raphaël Siboni explorent et dérèglent ces croyances en des puissances artificielles, allant de la ‘Force’ du côté obscur au Pogo Straight Edge, en passant par les concours de Tuning SPL.
Leur travail consiste à amplifier ces rituels contemporains, produisant des formes aberrantes et boursouflées, vision futuriste angoissante d’un entertainment culturel généralisé qu’ils préconisent.

Pour SUPERDOME (29 mai – 24 août 2008), une armée de Dark Vadors, dotée d’une intelligence artificielle maléfique, compose le tube des Ténèbres. L’installation se compose de 300 répliques en terre cuite noire émaillée du casque de Dark Vador, héros maléfique suprême de la trilogie Star Wars, créée par Georges Lucas en 1977.
Cet ensemble de casques constitue une formation militaire, comme une lointaine réminiscence de l’armée de Xian (armée en terre cuite de l’empereur Qin Shi Huang composée de six mille guerriers grandeur nature).
Chacun de ces casques, équipé d’un puissant microprocesseur relié aux autres casques et à un ordinateur central, participe d’un système d’intelligence artificielle inspiré par des processus biologiques.
Ce « cerveau » surpuissant, doté d’une forme d’absolu, cherche à atteindre synthétiquement le tube musical le plus sombre de tous les temps, diffusé dans l’espace en temps réel.

Le casque de Dark Vador, figure ultime et unique du Vilain est ici mis en série, infini comme cette courbe de noirceur régissant un processus musical à la recherche du Mal absolu. Que devient la figure du plus Vilain lorsque celle-ci est légion ?
Ce maximum de noirceur ne semble être ici que le point de départ d’une quête superlative et abyssale. Tout au long de l’exposition, à partir d’une mémoire composée d’une multitude de morceaux de musiques allant de la techno hardcore au requiem de Fauré, et par un système d’écoute, d’analyse et d’apprentissage, les Dark Vadors réunis autour d’un même idéal de noirceur, tenteront de recomposer ce chant oublié des ténèbres.

Cybernétique musicale : Robin Meier et Frédéric Voisin.
Apprentissage mix : Franck Rivoire.
Synthétiseur : Olivier Pasquet.

(Texte du site du Palais de Tokyo)