FICTIONS QUOTIDIENNES.2003

Inés Moreno

 Casa tomada

Habiter le passage

En prenant le quotidien comme point de départ, il s’agit de faire une réflexion sur des espaces domestiques, sur tout ce qui conforme notre environnement le plus immédiat, ce qui nous entoure d’habitude, ce qui se filtre par-dessous de nos gestes, de nos automatismes. C’est surtout la prise de conscience sur le quotidien, la opération minutieuse de sauver (lo de todos los dias ) comme partie d’un nouveau imaginaire, de remarquer ce qui ne s’aperçoit pas, ce qui à force de connaître devient presque invisible, de accumuler les mouvements réitérés, inconscients et prendre soin d’eux, les transformer en événement.

Se rendre compte de gestes comme ouvrir ou fermer une porte, l’action de traverser le seuil d’une porte, en sortant d’un espace pour arriver à un autre. Les portes établissent par définition une sorte de dialectique, elles sont des dispositifs qui communiquent différents espaces, entre extérieur et intérieur, entre présence et absence Elles sont des lieux où s’opèrent tous les changements, les transitions entre plusieurs instances, entre plusieurs états. Dans une maison, il y a une série d’espaces qu’on peut définir comme transitoires, dont sa fonctionnalité transforme en résiduels, sans importance, dont on peut se passer.

Repenser l’espace d’une maison, désarticuler sa structure interne à travers d’opérations de dissociation, d’éclatement. Charnières qui se dédoublent, portes qui n’arrivent jamais à se fermer ou qui se ferment vers plusieurs directions, qui restent suspendues dans l’intervalle entre deux réalités. C’est dilater le passage, élargir l’instant de le traverser, rester, habiter la limite. Il y a la proposition d’une nouvelle façon de parcourir un espace en prenant conscience des états interstitiels à travers de changer la vitesse de perception, en étant attentif à la transformation, au processus, élargir le temps de la contemplation pour entrevoir l’imperceptible. Et il s’agit pourtant d’un espace bien connue qui d’un coup a devenu inquiétant, méconnaissable d’une certaine manière, qui a été rythmé par des bruits sans source apparente. Il y a parfois le trace d’une présence, qui donne l’idée d’une quête, d’une recherche. La maison, l’ensemble des espaces intérieurs et extérieurs, devient une enceinte de circulation omnidirectionnelle, où on peut sauter d’un état à un autre, où n’existent pas les catégorisations spatiales, dont il n’y a pas des espaces plus importants qu’autres.

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