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Hikaru Fujii, artiste : Conférence du 27 octobre 2004 à Paris 8
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Préambule à "Design illimité des corps inachevés"
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De la programmation Utilitarisme et singularité
Logique du processus de production du software
[...] L'objet qui arrive jusqu'à nous n'a pas d'auteur précis.
Il n'y a plus d''auteur' d'objet. il n'est plus possible de connaître l''idée' originelle de la forme du produit, l'idée directrice, l'essence fonctionnelle, éparpillée par les besoins, strates accumulées sur l'objet du marketing. L'essence est obscure pour l'utilisateur. Il n'est plus possible de déterminer à qui incombe la responsabilité' formelle du produit. Au fond, la logique de production confine à la création de formes insaisissables, à la fois diffuses et confuses: c'est l'idée que nous allons développer.
Ce qui est certain, c'est qu'à défaut de remplir en soi une fonction utopique (objet singulier, unique, idéal) le produit touche notre désir et notre libido, les attire: parce que nous sommes stratégiquement modélisés par le marketing afin de devenir le/un 'consommateur'. Consommateur, au premier sens, simple, de celui qui, activement, consomme, désire et achète.
La modernité appelait le devenir industriel. La modernité, en soi, est liée, selon Walter Benjamin, à la révolution industrielle. Aujourd'hui, le devenir industriel est terminé: nous sommes industrialisés, mis en série, modélisés.
L'artiste vit dans ce monde 'industriel' et travaille un (le, des) produit(s) industriel(s). Il travaille sur une forme hyper complexe de produit (d'outil) intitulé 'software'. Il en joue, ou s'en sert, l'utilise simplement: le produit est là, désormais nécessaire, que l'artiste ne peut éviter.

[Hikaru Fujii, Design interactif. Modèlisation esthétique et sociale de Peter Behens à Max Msp, Mémoire de DEA, octobre 2004, sous la direction de Jean-Louis Boissier,
Université Paris 8, UFR1, Département Arts Plastiques, pp. 43-44]
http://perso.ensad.fr/ari/fujii/index01.html

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Tao > invention d'un "outil".
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Un "outil", originairement, est fabriqué dans un but pratique, conçu pour l’utilisateur. Cet objet, simplement utile, n’a pourtant pas de place dans notre société de consommation, il n’existe pas réellement. Son caractère simplement utile, désormais utopique, s’est effondré. Il ne reste qu’un "produit", qui s’est développé selon les calculs du marketing.

Le produit" qui arrive jusqu’à nous n’a pas d’un concepteur de forme. Il n’y a plus d'"auteur" de cet objet. Il n’est plus possible de connaître l’'"idée" originelle de la forme du produit, l’idée directive, l’essence fonctionnelle. L’essence est obscure pour l’utilisateur. Il n’est plus possible de déterminer à qui incomber la "responsabilité" formelle du produit. Au fond, la logique de production confine à la création de formes insaisissables, à la fois diffuses et confuses (Tokyo, porte automatique).

Mais, ce qui est certain, le produit touche notre désir et les attire: parce que nous sommes stratégiquement "modélisés" par le marketing afin de devenir le "consommateur". Consommateur, au premier sens, simple, de celui qui, activement, consomme, désire et achète.

La modernité qui liée, à la révolution industrielle appelait au devenir industriel. Au jour d’aujourd’hui, le devenir industriel est terminé: nous sommes industrialisés, mis en série, modélisés.

Alors, l’artiste vit dans ce monde "industriel" et travaille avec le produit industriel. Il travaille sur une forme hyper complexe de produit intitulé "Software". Il en joue, ou s’en sert, l’utilise: le produit est là, désormais nécessaire?

Outil / Utilisateur > Produit / Consommateur
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L'histoire de Max Msp
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(1) MIDI (Musical Instrument Digital Interface), Il s’agit d’un protocole permettant la transmission de données entre plusieurs instruments de musiques électroniques (synthétiseurs)

(2) Max est construit pour « simplifier » l’utilisation du synthétiseur 4X développé à l’Ircam par Giuseppe Di Giugno, son concepteur, et Jean-Pierre Armand.

(3) DSP (Digital Signal Processor) est un microprocesseur optimisé pour les calculs.£

(4) Le pionnier de Max, Miller Pulette, s’est chargé du développement de PD (Pure Data). PD étant l’environnement de Max et FTS fusionnés. Il est compatible à Unix, Windows NT en OpenSaurce (www.pure-data.org).

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[Présentation de projet Plis]


Max est né à l’IRCAM, qui est un lieu de l’invention de l'"outil" informatique pour la musique, le scientifique, l’ingénieur et l’artiste procédaient de façon stratégique au montage de nouveaux mécanismes destinés au service d’un problème spécifique de leur expérience esthétique. Le nouveau mécanisme est nécessaire, utile à la réalisation du " concept " de l’artiste. Il est nécessaire de franchir la limite de leur " technique existante " afin de réaliser leur " nouvelle " expérience esthétique. Les nouvelles fonctions est donc des résultats de leurs nouvelles expériences.

Max est apparu en tant que nouvelles fonctions, nouvel alphabet. Un alphabet qui permette lui aussi de penser la musique de manière nouvelle.

Max est né à l’IRCAM en 1986, en collaboration avec l’éditeur Patcher. Max a été conçu par Miller Puckette pour la réalisation pour Philippe Manoury de Pluto. Pour ce projet, Max a fourni le traitement MIDI
(1) afin de contrôler le processeur numérique en temps réel 4X (2). Trois ans plus tard, avec l’éditeur OPCODE, David Zicarelli a repris leur développement et a réalisé la première génération d’architecture de Max. Il a adapté le traitement en temps réel MIDI et l’interface graphique (sur laquelle nous reviendrons). En 1995, la version Max 3.0 est apparue. Il est dès lors devenu possible de contrôler l’image vidéo (QuickTime). En 1997, Max s’est fait connaître grâce à la deuxième génération présentée chez l’éditeur " CYCLING’74 " sous le nom de Max Msp. Celle-ci adapte alors une nouvelle architecture DSP (3) avec laquelle il est possible de produire le son indépendamment du fonctionnement MIDI et d’autres appareils externes.

Ce nouveau fonctionnement DSP était déjà utilisé dans d’autres environnements – par exemple PD
(4). L’intérêt était de pouvoir utiliser ces fonctions tout en restant au sein de l’environnement Max.
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•04 Produit industriel > Amélioration
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(5) nato est une série d’objects externes dédié au traitement de l’image en temps réel. 0f0003 est le nom de son producteur (www.eusocial.com).

(6) SoftVNS 2 est comme nato, en beaucoup plus stable. Son auteur est David Rokeby

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Depuis 1999, les nombreuses fonctions de traitement de l’image ont été développées sur
Max Msp, tout comme nato (5) et SoftVNS 2 (6), utilisés jusqu’à aujourd’hui dans divers domaines comme l’art d’installation, la danse et le théâtre.

En 2001, la nouvelle version
Max4.0 Msp2.0 a introduit de nombreuses améliorations, et notamment la nouvelle possibilité de programmation basée sur son script originel. Cette nouvelle forme de programmation lui permet d’étendre son fonctionnement, fonctionnement possible, au demeurant, au moyen du langage C. En 2002, sous le nom de Jitter, le nouvel environnement de programmation conçu pour l’image vidéo s’est stabilisé. Depuis 2004, Max Msp Jitter version 4.5 permet de faire de la programmation avec les langages Javascript et Java.

Il y a donc une histoire de Max et par là-même, une "évolution".
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Cette évolution est une extension de sa capacité. Le programme Max Msp Jitter a sans cesse été "mis à jour" afin de s’adapter aux formes désirées par les artistes. Autrement dit, ce logiciel a "mémorisé" les gestes, les constructions des artistes.

Les expériences des artistes ont été "conservées" dans la mémoire de ce logiciel. Le logiciel dispose de leur mémoire. C’est par eux qu’il s’est construit, amélioré, développé, en fonction de leurs désirs et de leurs besoins.

Max Msp ne fait pas cependant simple figure de dépôt. "On n’hérite pas d’un stock" disait Jacques Derrida. Un objet n’est jamais constitué d’un ensemble brut. Max est une banque de données. Il a été interprété, filtré, mis en ordre. Le logiciel est un "héritag ". Il implique des actes de décision, de réponse, et donc de sélection, de choix. Il agit comme nous, notre mémoire.

Ce produit est une synthèse de la mémoire technique des artistes. Max est le produit d’une accumulation sur 20 ans d’environ 450 fonctions sonores (que l’on appelle "objects") et de 140 fonctions/objects visuels. Si l’on commence à prendre en compte la partie extensible du logiciel, il devient possible de dépasser les 1000 fonctions/objects possibles. D’ailleurs, si l’on compte aussi les "modules" diffusés sur Internet que les musiciens et les plasticiens ont laissés libre de décider du type de "combinaison" ou "mélange" des objects qu’il veut mettre en oeuvre, les fonctions sonores et visuelles atteignent un chiffre colossal. De plus, avec Max, il est possible d’ajouter des fonctions informatiquement identiques depuis d’autres logiciels, de type Fi
nal Cut Pro, After Effects, Photoshop, 3D studio Max, Illustrator, Pro Tools, Peak, Macromedia Director, qui mémorisent également les techniques spécifiques des artistes.

Les techniques sont mémorisées et accumulées dans le corps de ce produit, ce qui permet de mettre à la "disposition" de l’artiste une très grande "variété" des techniques de création sonore et visuelle.

Mais, la mémoire conservée, sa qualité elle-même, pose la question véritable du développement de l'"expérience esthétique".

Avec un produit comme Max, l’expérience "avant garde" du scientifique, de l’ingénieur et de l’artiste semblent disparaître: l’artiste rentre dans le comportement de "choisir" et de "modifier" les options proposées. Ce qu’on appelle, la "personnalisation", étant comme la tendance actuelle de divers produits industrialisés. La "personnalisatio " créé une forme de liberté, mais avec des paramètres précis, presque paradoxalement "bloqués". La forme donnée par l’artiste soumise au "conditionnement" esthétique de la technique proposée.

Le résultat d'oeuvre: on reconnaît souvent l’esthétique de "Max", on reconnaît davantage la texture et la méthode du logiciel que la petite signature de l’artiste.


>>>> doc Max OverView

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•05 D’où vient cette tendance technique de "personnalisation"
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GUI (graphical user interface) a été implanté en 1970 via le langage de programmation Smaltalk par Alan Key à XEROX, Palo Alto (PARC).

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fenêtre (Window), icône (Icons), menu (Menus) et dispositif de pointage (Pointing device) appelé WIMP inventé par l’entreprise Xerox et rendu célèbre par Macintosh dans les années 1970.

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Depuis toujours, la science informatique liée au marketing a consciemment cherché un maximum d'efficacité, de satisfaction et de bien-être dans le processus d’utilisation de l’interface, de manière à l’adapter à "tous" les utilisateurs. Cette démarche a poussé la recherche à mieux connaître la ressource du système humain en "groupe", ce que l’on nomme "ergonomie" étant considéré comme le principal outil permettant de définir les standards d'utilisation de l’interface "désirante". L’environnement de l’ordinateur est devenu "pulsionnel".

L’un des produits les plus novateurs de l’ergonomie est la prolongation de plusieurs paramètres d’ordre physiologiques, cognitifs, psychologiques, sémiologique et sociologiques : c’est le système "GUI (graphical user interface)".
(7)

L’environnement de Max Msp Jitter s’affiche en mode GUI, c’est-à-dire en forme de "synthèse d’image", comme c’est le cas pour les fenêtres, les icônes, le menu et le dispositif de pointage
(8) de l’écran sur lesquels l’utilisateur peut agir avec les périphériques d’entrée comme la souris.


Sur le mode de GUI, la réalisation de l’œuvre devient possible en "temps réel". Avec le système GUI, l’artiste peut construire son œuvre en la modifiant. L’interaction entre l’artiste et son support devient temporellement possible dans un rapport en "direct". La vitesse absolue de l’interaction "immédiate".


L’environnement de GUI permet de faciliter la jonction de plusieurs mécanismes de manière non uniforme. Avec les éléments graphiques dans lesquels tel type de mécanisme de contrôle est "déjà" mémorisé, on peut disposer facilement de plusieurs fonctions en "même temps". Ainsi la "modification" et la "projection" sont réalisables en "même temps".

Autrement, dans l’environnement GUI, tous les graphiques reflètent des mécanismes de contrôle. L’élément graphique que l’utilisateur agit n’est donc qu’un paradigme technologique, avec une fonction qui lui est propre. L’interaction immédiate à travers l’interface graphique s’inscrit donc sur un mode d’interaction "réversible" au sein de laquelle la "venue" est prévisible et calculable.

Via GUI, on ne peut attendre, il n’y a pas d’événement. Parce qu’il y a un horizon d’attente, une anticipation, une prévision, une programmation. L’événement est celui qu’on ne peut pas atteindre, celui qui se forme dans l’absence d’un horizon d’attente. Le système GUI ne permet pas cette absence.

L’interface graphique sur laquelle l’artiste agit doit toujours répondre au "même" effet que l’artiste attend. Cet effet ne doit pas être "inattendu".

Dans un environnement GUI, il n’y a pas d’événement, sa qualité seule constitue la création: pas de surprise, mais des conséquences nettes résultant de choix précis.


(C’est la même chose pour le logiciel Signwave Auto-Illustrator reprogrammé Adobe Illustrator, à travers lequel l’utilisateur ne peut pas contrôler ce qu’il désire. L’utilisateur est encore dans un horizon d’attente.)


Ainsi, il doit "protéger" sa qualité pour ne pas être transformé. Il doit "sécuriser" son identité L’environnement GUI doit être un monde sécurisé. C’est un monde (un mode) dans lequel il n’y a pas d’autre risque que la venue programmée. L’interface Max Msp Jitter "assure" à l’utilisateur un monde sécurisé. Des conséquences nettes résultant de choix précis.


Cette "prémisse" déclenche une "déstabilisation" du comportement chez l’utilisateur. L’utilisation devient dès lors "pulsionnelle".

L’utilisateur exécute des fonctions avant qu’il ne prenne conscience des mécanismes du logiciel, ce que disait Gilles Deleuze en rapport avec le "corps" prostitué: "non plus ce que ça veut dire, mais comment ça marche, comment ça fonctionne. Comme si le désir ne voudrait rien dire, mais était un agencement de petites machines, machines désirantes...". L’utilisateur apprend la nouvelle fonction en prenant connaissance de l’interface graphique. Ce fonctionnalisme devient idiomatique. Il découvre sans cesse de nouvelles différences. Sa carte géographique s’étend jusqu’à la limite de ce monde sécurisé.

Mais s’il reste sur le mode GUI, il ne peut plus percevoir sa limite.

Dans un environnement GUI, il est informatiquement impossible de contrecarrer le principe du système. Au sein du monde sécurisé, il n’y a pas d’interaction irréversible. Le système reste toujours sa " condition originaire ". Le comportement de l’utilisateur n’est qu’un mode de variation autour d’une base inébranlable. Il ne peut que " personnaliser " le paramètre conditionné.


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•06 SDK (Software Development kit)
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Mais le véritable problème, c’est qu'avec cette "machine désirante", on serait en droit d’attendre de la nouveauté, et non pas un monde inébranlable, une esthétique limitée, sécurisée.

L’artiste "attend" la venue de la nouvelle technique, il la guette, il conceptualise et réalise son ouuvre sous la condition technique à venir.


Le progrès de la science ergonomique provoque une distanciation de l'utilisateur envers le mécanisme réel de l'ordinateur. La division spécialiste/non-spécialiste est neutralisée au sein de la société industrialisée, et l’artiste travaille désormais sur un mode "corrélatif".

En rapport avec une multitude de mémoires qui se construisent ensemble.


Nous avons vu que le programme Max est une banque de données de techniques héritées. Nombre d’expériences esthétiques y ont été mémorisées par une technologie d’archivage numérique. D’autre part, nous avons vu que le progrès de toute forme de science conduit à une simplification de son langage originel afin de pouvoir l’adapter à la collectivité, c’est-à-dire au marketing. Par conséquent, l’attente des nouvelles techniques devient idiomatique.

Dans le flux de technique accumulé, la part singulière des artistes se confond, se mélange. Avec Max, la " synthèse " de ces techniques héritées devient une activité artistique centrale. La notion de " remix " a pris un rôle majeur pour l’utilisateur de cet outil informatique.


Le problème est que ces techniques mémorisées sont "anonymes". Il n’y a pas d’auteur, ni de contexte historique de ces "écritures" informatique (après la sélection et la filtration cultuelles de éditeur CYCLING’74); on les a simplement sauvegardées comme des fonctions "mécaniques" en les classifiant par ordre alphabétique. Le programme Max Msp Jitter est un espace "commode" et "rangé" en apparence, mais en fait, il s’organise en une forme d’"entropie".


Avec Max Msp Jitter, l’utilisateur se sert de fonction mécanique, alors que la fonction mécanique n’a pas pu défendre son identité artistique. La technologie de l’archivage n’a pas sauvegardé la "propriété intellectuelle" de la fonction mécanique de Max. Par conséquent, elle est ignorée.

Pourtant, la fonction mécanique autrement dit le programme est un "système" informatique de production sonore et visuel "particulier" (singulier) sur lequel l’artiste peut modifier les paramètres afin de le "personnaliser". La fonction mécanique est une machine de "production" de "singuliers", qui les produit "singulièrement". Comme l’appareil photographique, le phonographe, le cinématographe, il a sa propre " fonction " qui entre en rapport avec le "processus organique dans la mesure où il contribue au maintien de l’organisme", c’est ce que Bertalanffy appelle le "système".

Par la production de son système propre, le produit est organisé "singulièrement".


Réciproquement, on peut dire aussi que l’activité de discernement et que l’interprétation humaine sont "différemment" organisées selon les différents systèmes de production, c’est ce que Walter Benjamin nous a montré à propos du cinéma. Mais aujourd’hui, le processus de production de l’objet sonore et visuel ne peut plus être "standardisé". La recherche scientifique nous conduit vers un monde nettement plus "instable".

L’artiste sculpte lui-même son système de production.


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•07 Projet : "Circonstance" et conclusion
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Dans cette performance, Fabien Giraud et moi-même avons tenté de replier l’image sur elle-même, qu’elle n’ait plus rien à voir avec sa production, son mouvement matériel d’apparition, qu’elle s’en détache. Il s’est agi de placer le spectateur dans le territoire de cette émergence, de mettre en tension les conditions qui la supportent et la modèlent.

Deux rails de travelling traversent le bureau du directeur de l’école d’art (École Nationale Supérieure des Arts Décoratifs). Ils sont tendus d’un mur à l’autre par un système de vérin. Deux caméras sont fixées dos à dos sur un chariot motorisé et circulent sur les rails. Au bout de sa course, le chariot heurte le mur, rebondit et repart en sens inverse. Le mouvement est continu d’un mur à l’autre pendant toute la durée de la performance. Chaque heurt du chariot avec la surface du mur produit un son qui est amplifié dans tout l’espace.

L’image produite est diffusée sur un écran divisé en deux. Sur chaque partie de l’écran est projetée l’image de l’une des deux caméras.

L’image seule n’évoque rien, ne réfère à rien, ne renvoie à aucune présence. Pur mouvement machinique, elle n’existe et ne fait sens qu’en fonction des circonstances que nous partageons dans l’immanence de sa découverte.


Le problème du produit Max est que l’écriture informatique "singulière" en tant que production de singularité formelle est enregistrée dans la banque de données de Max de manière entropique. La singularité de l’écriture informatique n’a pas été protégée et transférée en tant que plasticité d’individus et les individus. Il n’y a pas de signature. Il est anonyme, comme "désingularisé". Il n’est qu’une "machine" commune.


L’utilisation d’un système "anonyme" en tant que "machine" a produit une figure de l’artiste en tant qu’"individu technique", privé de son savoir et réduit à la condition de pur servant de la machine ayant elle-même extériorisé ce savoir. C’est ce que Simondon appelle une "perte d’individualisation".

Il en devient par là-même difficile de défendre la notion de "remix" des systèmes de la multitude en tant que conflit dialogique "culturel", en tant qu’expérience esthétique "singulière".